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Guerre en Ukraine : les évacuations se poursuivent dans les localités submergées après la destruction du barrage de Kakhovka

Plus de 600 km2 étaient inondés jeudi matin, selon le gouverneur régional ukrainien, deux jours après la destruction de l'édifice. Les évacuations sont particulièrement complexes.
Article rédigé par Fabien Magnenou
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Des habitants évacuent un quartier inondé de Kherson (Ukraine), le 8 juin 2023, deux jours après la destruction du barrage de Kakhovka qui a entraîné d'immenses inondations en aval. (ALEKSEY FILIPPOV / AFP)

L'urgence est toujours de mise dans la région de Kherson, deux jours après la destruction du barrage de Kakhovka. Jeudi matin, près de 2 000 personnes avaient été évacuées sur la rive occidentale du fleuve Dnipro, a déclaré sur Telegram le gouverneur régional de Kherson, Aleksandr Prokoudine. Ce dernier ajoute que 600 km2 se trouvent désormais sous l'eau : 32% sur la rive occidentale et 68% sur la rive orientale, occupée par l'armée russe. De leur côté, les autorités d'occupation ont annoncé plus de 4 500 évacuations. 

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Zodiac, kayak, paddle, radeau de fortune... Sur la rive occidentale, les habitants ont utilisé tous les moyens possibles pour fuir la montée des eaux. C'est particulièrement vrai dans le quartier de Korabel, le plus touché de Kherson, où 1 500 personnes ont déjà été évacuées. Le président Volodymyr Zelensky s'est rendu aux abords du district, jeudi matin, afin de saluer le travail des secouristes. Il a également tenu une réunion de travail pour coordonner l'aide humanitaire. Celle-ci est complexe. "La difficulté, c'est d'accéder aux maisons inondées", explique Ksenia, une employée de l'Unicef interrogée par franceinfo. "Beaucoup de gens dans les zones inondées n'arrivent pas à se rendre dans les points d'évacuation", ces lieux de rendez-vous aux abords des quartiers touchés.

Les services d'urgence estiment que "20 localités et 2 629 maisons" ont été inondées sur la rive contrôlée par les forces ukrainiennes. Les tirs d'artillerie compliquent encore des opérations de secours déjà difficiles. "On doit arriver de bonne heure, mais on doit repartir aux environ de 3 heures parce que c'est là qu'il y a, en général, une intensification des bombardements", ajoute Fabrice Martin, directeur de l'ONG Care. "On est quand même dans cette ambiance de guerre."

Certains habitants, par ailleurs, n'ont aucune intention de quitter leur domicile. Un homme de 53 ans est mort dans le village de Vassylivka après avoir refusé d'être évacué, selon la police de la région voisine de Mykolaïv.

Des habitants de Kherson fuient les inondations lors d'une évacuation, le 7 juin 2023. (ALEKSEY FILIPPOV / AFP)

L'armée russe frappe des points d'évacuation à Kherson, a par ailleurs accusé sur Telegram le ministère de l'Intérieur ukrainien. "Les bombardements ont commencé pendant l'évacuation d'habitants dont les maisons avaient été inondées", précise la même source. Au moins trois personnes ont été blessées : une civile, un policier et un secouriste.

Situation critique sur la rive contrôlée par les Russes

Sur la rive gauche (orientale), la situation est tout aussi préoccupante, d'autant que la topologie est encore plus défavorable. Au moins cinq personnes sont mortes dans les inondations, a annoncé le maire de Nova Kakhovka, Vladimir Leontiev, cité par les agences de presse russes, et deux personnes sont toujours portées disparues. La ville d'Olechky, proche d'une zone de marais, est particulièrement touchée. Le maire élu en exil, Yevhen Ryschouk, affirme que certains habitants patientent depuis deux jours sur leur toit, et que la localité se trouve désormais à 90% sous les eaux.

A gauche, la localisation d'Olechky, proche d'une zone de marais et du fleuve (avant les inondations). A droite, zoom sur une partie de la ville occupée, le 7 juin 2023, après la destruction du barrage de Kakhovka. (GOOGLE MAPS / MAXAR TECHNOLOGIES)

Le dirigeant d'occupation de la région de Kherson, Vladimir Saldo, a accusé, sur Telegram, les forces ukrainiennes d'avoir tiré sur le point d'évacuation de Holaya Pristan. Selon lui, deux personnes ont été tuées et deux autres ont été blessées. 

Le niveau de l'eau continue de monter dans la rivière Inhoulets, affluent du fleuve Dnipro, signale sur Telegram l'administration régionale de Kherson. Cinq localités sont potentiellement inondables, et l'eau approche des habitations. En revanche, le niveau de l'eau diminue progressivement dans le secteur de Kherson, sur le fleuve, mais il dépasse toujours les 6 mètres.

La zone potentiellement inondable après la destruction du barrage de Kakhovka, en territoire ukrainien occupé par les forces russes. (HELOÏSE KROB / FRANCEINFO)

Selon Ihor Syrota, le directeur général de la compagnie Ukrhydroenergo, qui gère l'infrastructure, il sera impossible de réparer le barrage de Kakhovka. Le niveau d'eau a déjà diminué d'un mètre dans le réservoir, qui se vide progressivement. "Nous allons stocker de l'eau dans les réservoirs en amont, afin de remplir le réservoir de Kakhovka dès que possible, après la libération du territoire", a-t-il précisé dans un message relayé par sa compagnie sur Telegram. Selon lui, cinq années seront nécessaires pour bâtir une nouvelle retenue, à condition de travailler "7 jours sur 7 et 24 heures sur 24". Le Fonds de reconstruction ukrainien a débloqué en urgence 38 millions d'euros pour lancer la pose de nouvelles conduites d'eau, l'aménagement de puits supplémentaires et la distribution d'eau potable.

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