"L'objectif est de vivre et de revenir avec les infos, pas de devenir une partie des infos" : deux reporters de guerre livrent leur expérience
Nathan Hodge, grand reporter à CNN, et Olga Rudenko, rédactrice en chef du Kyiv Independent, étaient invités du festival Médias en Seine afin de partager leur expérience sur la stratégie des médias sur les terrains de guerre.
L'un a parcouru le monde de champ de bataille en champ de bataille, l'autre décrit l'agression de son pays par son voisin depuis février. Nathan Hodge, grand reporter à CNN, et Olga Rudenko, rédactrice en chef du Kyiv Independent sont venu témoigner de leur expérience du terrain lors du festival Médias en Seine, le 22 novembre 2022, à la Maison de la Radio et de la Musique.
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Nathan Hodge, désormais basé au bureau londonien de CNN, a parcouru les terrains les plus délicats : Afghanistan, Pakistan, Irak, Ukraine... "L'enjeu est de vivre et de revenir avec les infos, pas de devenir une partie des infos", lâche le grand reporter. Heureusement, d'après le journaliste américain, la sécurité des reporters sur le terrain s'est améliorée. "Je pense que les rédaction prennent beaucoup plus au sérieux leur devoir à l'égard des journalistes qui se rendent sur le terrain et mettent leur vie en danger. L'équipement de protection est meilleur, la formation médicale. Et vous bénéficiez de l'expérience d'autres journalistes qui ont travaillé sur place", dit-il.
Olga Rudenko ne pensait pas devoir raconter une guerre au jour le jour lorsqu'elle a fondé avec d'autres The Kyiv Independant, en novembre 2021. "J'ai fait quelques reportages en 2014 alors que l'invasion commençait tout juste dans l'est de l'Ukraine, dans le Donbass, et j'ai également fait des reportages depuis la Crimée occupée", raconte-t-elle. "Je n'aurais jamais pensé devoir couvrir la guerre", poursuit-elle.
"Je ne pense pas que beaucoup de journalistes rêvent de devenir reporters de guerre. C'est l'une des choses les plus difficiles à faire dans le journalisme."
Olga Rudenkoà Médias en Seine
"Je ne me considère pas comme un journaliste de guerre, estime Nathan Hodge. Ce qui m'intéresse le plus, c'est les histoires humaines, et très souvent, certaines de ces histoires se déroulent dans les circonstances extrêmes d'un conflit. Mais la guerre en elle-même n'est pas le sujet."
Un récit indépendant basé sur des faits
Il ne s'agit pas dans un conflit de se contenter de retransmettre les deux discours opposés des belligérants assure Nathan Hodge : "Nous essayons chaque fois que nous le pouvons de vérifier les faits par nous-mêmes, de voir les choses par nous-mêmes, d'être des témoins oculaires directs des choses, puis de nous en servir pour évaluer. Notre responsabilité en tant que journalistes n'est pas de diffuser les deux versions. Notre objectif est de découvrir la vérité sous une forme ou une autre, de mettre fin à la désinformation, à la propagande et à informer nos lecteurs et nos spectateurs lorsque quelqu'un dit un mensonge."
Pour les journalistes du Kyiv Independent, l'exercice est encore plus délicat car il s'agit de couvrir l'invasion de leur propre pays par la Russie. Pourtant Olga Rudenko l'assure, cela ne les empêche pas de mener à bien leur travail de journaliste. "Je pense que nous avons réussi à trouver l'équilibre entre le fait d'être citoyens ukrainiens et le fait d'être journaliste. Aucun compromis n'a été fait pendant toute cette guerre et je n'ai aucune honte. Nous n'avons jamais caché d'informations, nous n'avons jamais rien fait, même de loin, de propagande. Nous restons indépendants et faisons notre travail du mieux que nous pouvons."
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