La fin du transit du gaz russe par l'Ukraine provoque incertitude et fébrilité dans l'Est de l'Europe

Plusieurs pays sont concernés par cette décision de Volodymyr Zelensky, à commencer par l'Ukraine, qui va perdre une partie de ses revenus.
Article rédigé par Mélanie Kuszelewicz
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Une casserole sur une gazinière, à Munich, en Allemagne, le 31 janvier 2023. (FRANK HOERMANN / SVEN SIMON / SVEN SIMON)

Le 31 décembre au soir, l'Ukraine n'autorisera plus le transit du gaz russe en direction des pays européens via son territoire. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky l'avait annoncé cet été : il ne reconduira pas le contrat quinquennal signé avant le début de l'invasion russe en Ukraine pour faire transiter le gaz russe vers l'Europe via son réseau étendu de gazoducs.

En 2021, avant le début de la guerre en Ukraine, le gaz russe représentait 40% de l'approvisionnement vers l'Europe. Depuis, cette part a été divisée par trois, voire quatre. Ce qui a provoqué une augmentation des prix partout en Europe.

Certains pays dans l'Est de l'Europe sont encore très dépendants du gaz russe, comme la Slovaquie, la Moldavie et, dans une moindre mesure, la Hongrie. Cette décision du président ukrainien aura donc des conséquences en Europe, mais le premier pays impacté sera l'Ukraine.

En stoppant le transit de gaz russe via son réseau de gazoducs, Kiev se prive d'une importante source de revenus, selon Patrice Geoffron, professeur d'économie et directeur du Centre de géopolitique de l'énergie et des matières premières (CGEMP), à l'université Paris Dauphine. Il estime que les revenus liés au gaz russe représentent 0,5% du PIB de l'Ukraine. Ce qui "n'est pas totalement négligeable", souligne l'économiste.

Des livraisons de GNL américain

De son côté, pour compenser la réduction drastique des livraisons de gaz russe, l'Union européenne se fait livrer par bateau du gaz naturel liquéfié (GNL) américain. L'Ukraine a d'ailleurs reçu sa première livraison de GNL américain, vendredi 27 décembre. Mais ce n'est pas encore suffisant pour remplacer tout le gaz acheté à la Russie.

En plein hiver, le risque c'est donc une augmentation du prix du gaz dans un marché énergétique déjà sous tension. Le prix de référence du gaz, qui est celui du marché néerlandais, "est environ 10 euros plus élevés que ce n'était le cas il y a un an, donc on est aux alentours de 45 euros" le kWh, "et ça peut s'expliquer notamment par ce contexte et ces perspectives", détaille l'économiste Patrice Geoffron.

Mais cette augmentation ne doit pas durer des années. Si à terme l'Europe se passe totalement du gaz russe, comme le prévoit la Commission européenne à l'horizon 2027, l'importation de GNL américain va encore fortement augmenter.

La Slovaquie menace de représailles

La fin du transit de gaz russe via l'Ukraine pose particulièrement problème à la Slovaquie. Elle s'oppose fermement à la fin de ce contrat, à la fois parce qu'il alimente largement le budget slovaque, mais aussi parce que la Slovaquie l'un des deux derniers pays européens à être restés proches du Kremlin, avec la Hongrie. Le Premier ministre slovaque Robert Fico reproche à Kiev de mettre en péril l'approvisionnement en gaz russe de son pays. Il a menacé l'Ukraine de couper son "approvisionnement en électricité dont elle a besoin quand elle a des pannes sur son réseau électrique".

Mais si l'Ukraine coupe le robinet de gaz russe, il y aura quand même des solutions, selon Patrice Geoffron. "Ce qui pourrait advenir, c'est que du gaz remonte à rebours du reste de l'Europe vers la Slovaquie", explique l'économiste qui assure que "les infrastructures pourraient le permettre". "En revanche, évidemment, ça ne se ferait pas dans les mêmes conditions économiques, donc ce sera un problème pour la Slovaquie à l'évidence", reconnaît le spécialiste.

Malgré ses différends sur le gaz russe avec Kiev, la Slovaquie s'est dite prête, vendredi 27 décembre, à accueillir sur son sol des négociations de paix sur l'Ukraine, avec la Russie.

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