: Reportage "Il y avait des explosions énormes et j'ai bien cru que c'était la fin" : dans l'enfer d'Irpin sous les bombes
La ville d’Irpin, en grande banlieue de Kiev, fait l’objet de bombardements intensifs depuis huit jours. Des milliers de civils ont été évacués, mais certains refusent de quitter leur domicile.
Maria porte un sac dérisoire dans lequel elle a entassé quelques vêtements. C’est avec ce seul bagage qu’elle a quitté son logement à Irpin, en grande banlieue de Kiev : "Cette nuit, le bruit était assourdissant. Il y avait des explosions énormes et j'ai bien cru que c'était la fin. Heureusement, grâce à Dieu, nous sommes sortis. Ca va aller maintenant, ça va aller... "
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En Ukraine, l’armée russe poursuit sa stratégie d’encerclement de Kiev. Elle concentre ses frappes sur le nord et l’ouest de la capitale. La ville d’Irpin fait ainsi l’objet de bombardements intensifs depuis 8 jours. Des centaines de civils fuient les frappes russes, en passant de l’autre côté d’un pont, détruit par les Ukrainiens afin d’empêcher les Russes d’accéder à Kiev. Pour rejoindre la ville, Il faut donc emprunter un sentier de tôles et de planches de bois jetées entre les rives d’un ruisseau. C'est non loin de cette zone que le journaliste américain Brent Renaud a perdu la vie : alors qu'il circulait en voiture avec un confrère et un civil ukrainien, il a été touché par un tir.
De l’autre côté, des volontaires aident les civils. Ils ont réquisitionné les rares véhicules qui roulent encore. "Des évacuations sont en cours, mais les Russes s'en moquent, dénonce Sergeï, l'un de ces volontaires. D'ailleurs, hier, des volontaires ont évacué des civils et se sont fait tirer dessus. Heureusement, personne n'est mort, mais certains ont été blessés et hospitalisés."
"Toutes les nuits, les Russes attaquent"
L’avenue principale traverse une ville fantôme : des carcasses de voitures devant des bâtiments en partie détruits, certains éventrés… Le véhicule s’arrête au pied d’une barre d’immeubles gris tenue par des soldats ukrainiens. A leur tête, le sergent Katchenko. "Irpin est pilonnée depuis sept jours maintenant. Toutes les nuits, les Russes attaquent avec toutes sortes d'armes : missiles, mortiers, canons... Messieurs, il faut aller aux abris. C'est très tendu.", s'interrompt l'officier, entendant le fracas de l’artillerie russe proche.
Direction l’abri au sous-sol de l’immeuble : au pied des escaliers, un couloir conduit à une grand cave. Une trentaine de matelas sont au sol, les uns contre les autres, des lits superposés, des provisions. Dans une odeur de renfermé, des civils vivent désormais ici pour se protéger des frappes russes.
Parmi eux, beaucoup de personnes âgées. Ludmila, 80 ans, ne quitte pas son épais manteau beige : "Je reste ici, je n'ai nulle part où aller et je ne peux pas évacuer. Même porter un sac, c'est difficile à mon âge. On n'a rien ici. Le soir, des gens cuisinent dans la cour à même le feu et je les rejoins pour avoir quelque chose dans le ventre. On a besoin de l'aide du monde entier. On ne mérite pas ça !"
Il est temps de quitter les lieux. Sur la route du retour, une unité de soldats ukrainiens, armés de lance-roquettes, remontent l’avenue principale : ils prennent le chemin des combats à quelques centaines de mètres de là.
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