: Vidéo Guerre en Ukraine : en ne qualifiant pas Vladimir Poutine de "dictateur", Emmanuel Macron garde une porte ouverte pour "maintenir un canal diplomatique"
Frédéric Encel, docteur en géopolitique et maître de conférences à Sciences Po Paris, analyse sur franceinfo jeudi l'allocution faite mercredi soir par le président français, qui s'exprimait depuis l'Elysée sur les conséquences de la guerre en Ukraine.
Ne pas qualifier le président russe de "dictateur" permet à Emmanuel Macron de garder "une porte ouverte pour maintenir un canal diplomatique avec Poutine", estime sur franceinfo le docteur en géopolitique et maître de conférences à Sciences Po Paris Frédéric Encel. Il a analysé l'allocution donnée mercredi 2 mars dans la soirée par le président français, qui s'est exprimé depuis l'Elysée sur les conséquences de la guerre en Ukraine.
franceinfo : "Nous ne sommes pas en guerre contre la Russie", a déclaré Emmanuel Macron : devait-il faire cette mise au point ?
Frédéric Encel : Oui, c’était très important. Institutionnellement, diplomatiquement, on n’est pas du tout en guerre contre la Russie. D’abord parce que la Russie n’a pas agressé la République française, et pas non plus un Etat membre de l’Otan. On ne peut pas dire qu’on n’est pas totalement partie prenante, mais en même temps il n’y a pas de guerre avec la Russie, et encore moins avec la population russe, qui ne soutient que mollement, voire pas du tout, son président dans l’aventurisme en Ukraine.
Emmanuel Macron et ses homologues européens misent-ils aujourd’hui sur un soulèvement contre Poutine en Russie ?
Je ne crois pas que ce soit possible, car la répression est aujourd’hui extrêmement dure en Russie, et n’a cessé de se durcir tout au long de la décennie passée. En revanche, je pense qu’il y a un espoir qu’au sein de l’armée russe, de la diplomatie, des oligarques, il y ait un mouvement de révolte, parce que ce qui est en train de se produire en Ukraine ne marche pas. Mais cela va aussi coûter extrêmement cher. La situation économique va se dégrader sous le coup des sanctions très dures.
Contrairement à Joe Biden et Boris Johnson, Emmanuel Macron ne qualifie pas Vladimir Poutine de "dictateur", pourquoi ?
Il a raison parce que ce n’est pas le problème. Aujourd’hui, le problème est l’agression de l’Ukraine, qui est un Etat souverain. Non seulement, il garde une porte ouverte pour maintenir un canal diplomatique avec Poutine, mais au-delà de cela, nous sommes alliés et amis avec des dictateurs. C’est vrai aussi des Britanniques, des Américains, et du monde entier.
Emmanuel Macron parle aussi de souveraineté militaire, l’idée d’une armée européenne est-elle en train de progresser avec cette guerre?
Oui, elle progresse d’une manière assez spectaculaire. C’est l’un des fruits amers, sinon pourris de l’aventurisme de Poutine en Ukraine. Je pense qu’il ne pensait pas que les Européens se souderaient aussi rapidement sur les sanctions commerciales, économiques et financières très fortes. Le tandem Macron-Le Drian n’a jamais cessé de s’échiner à convaincre les partenaires européens qu’il fallait monter en autonomie stratégique. Le monde d’après sera celui, sinon de la course à l’armement, celui du retour en puissance de l’Europe.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.