Présidentielle russe : l'OSCE dénonce des irrégularités, l'Occident ne fait pas de vagues
Paris, Washington et l'Union européenne ont demandé des enquêtes mais ont reconnu la victoire au premier tour de l'actuel Premier ministre qui va ainsi retrouver le fauteuil de président qu'il a déjà occupé de 2000 à 2008.
Une campagne électorale "clairement biaisée" en faveur de Vladimir Poutine et d'importantes irrégularités lors du décompte des voix. Le verdict des observateurs électoraux de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) est sévère, au lendemain de la victoire de l'actuel Premier ministre au premier tour de la présidentielle russe.
• Elu à la majorité dès le premier tour
Vladimir Poutine a recueilli environ 63,97% des voix, selon les résultats portant sur 98,47% des bureaux de vote. Le communiste Guennadi Ziouganov obtient 17,18% des voix, le libéral Mikhaïl Prokhorov 7,7%, le populiste Vladimir Jirinovski 6,24% et le centriste Sergueï Mironov 3,84%. Les résultats définitifs du scrutin sont attendus dans la journée de lundi.
• Poutine fête sa victoire après "une lutte honnête"
A peine les premiers résultats dévoilés, plus de 100 000 partisans du désormais ex-Premier ministre russe se sont regroupés au centre de Moscou devant une scène avec des écrans géants et des hauts-parleurs dignes d'un concert de rock. Quelque 36 500 hommes ont été mobilisés pour dissuader toute velléité de contestation, donnant par endroits à la ville des allures de camp retranché.
Vers 20 heures, accompagné de Dmitri Medvedev, Vladimir Poutine est apparu larmoyant, lançant à la foule : "Nos électeurs savent faire la différence entre le désir de renouveau et les provocations politiques dont le but est de détruire notre Etat.(...) Je vous avais promis que nous serions vainqueurs. Nous avons gagné. Gloire à la Russie !" Il a également balayé les soupçons de manipulation des votes, assurant : "Nous avons gagné dans une lutte honnête."
• Des fraudes constatées par l'OSCE et l'opposition
"Le processus s'est détérioré lors du décompte des voix et a été évalué négativement [par l'OSCE] dans près d'un tiers des bureaux de vote en raison d'irrégularités de procédure", a déclaré l'OSCE dans un communiqué.
Dans la journée de dimanche, les témoignages de fraudes se sont multipliés dans différentes villes du pays. Des blogueurs et des observateurs dépêchés par l'opposition dans les bureaux de vote ont signalé des infractions. Golos, un groupe indépendant, a dit avoir décompté au moins 2 283 irrégularités à l'échelle nationale.
"C'est une élection de voleurs, absolument malhonnête et indigne", a déclaré le candidat communiste, Guennadi Ziouganov, à la télévision. Vladimir Rijkov, un des organisateurs des manifestations d'opposition de ces derniers mois, a jugé de son côté que "pas un paramètre ne permet de considérer cette élection comme légitime".
• L'occident demande des enquêtes mais reconnaît la victoire
"L'élection n'a pas été exemplaire, c'est le moins que l'on puisse dire", a déclaré de son côté Alain Juppé, le chef de la diplomatie française. Mais selon lui, "on peut estimer que globalement, malgré ces critiques (...), la réélection du président Poutine n'est pas en cause".
Washington a appelé la Russie à enquêter de manière "indépendante" sur d'éventuelles irrégularités dénoncées par l'opposition russe et la mission d'observation de l'OSCE. Toutefois, la Maison Blanche s'est également dit "prête à travailler" avec Vladimir Poutine une fois les résultats validés, selon le département d'Etat.
De son côté, l'Union européenne s'est bornée à prendre "note" de la "nette victoire" du futur président russe, dans un communiqué du chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, qui "encourage" Moscou "à remédier aux lacunes" du processus électoral.
• Au pouvoir jusqu'en 2024 ?
Ces fraudes présumées sont au centre de toutes les attentions, depuis que des témoignages et des vidéos publiés sur internet lors des élections législatives de décembre dernier ont poussé des milliers de Russes à manifester contre le résultat des élections, dans un mouvement de contestation sans précédent depuis l'arrivée de Vladimir Poutine à la tête du pays.
Ce dernier, Premier ministre depuis 2008, avait quitté le Kremlin cette année-là faute de pouvoir effectuer plus de deux mandats consécutifs, conformément à la Constitution. Il va donc pouvoir retrouver son fauteuil de président pour la troisième fois. Et il pourrait bien y rester un certain temps, une réforme constitutionnelle ayant porté le mandat de quatre à six ans. Vladimir Poutine aura le droit de se représenter en 2018 et pourrait se maintenir au pouvoir jusqu'en 2024.
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