Reportage "L'électeur veut un changement" : en Autriche, l'extrême droite fait un bond historique aux législatives

Pour la première fois de l'histoire, le FPÖ a remporté les élections législatives en Autriche, dimanche.
Article rédigé par Sébastien Baer
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Herbert Kickl après la victoire de son parti aux législatives, 29 septembre 2024. (ALEX HALADA / AFP)

En Autriche, l’extrême droite a remporté, dimanche 29 septembre, un succès historique. Avec près de 29% des voix, le FPÖ de Herbert Kickl arrive en tête des élections législatives. Pour les conservateurs au pouvoir, en 2e position, et qui perdent 10 points par rapport à 2019, c’est un revers. Il s'agit du premier succès de l’extrême droite à un scrutin législatif. Scrutin qui doit permettre de désigner le chancelier. Une victoire largement célébrée, dimanche soir.

"Ensemble, on a écrit un morceau d’histoire" : les premiers mots de Herbert Kickl, le chef de l’extrême droite qui a vite rejoint ses militants réunis dans un restaurant transformé en quartier général de son parti. Tournée de bière gratuite, costume traditionnel autrichien et musique des années 70.

C'est dans cette ambiance, dans ce décor, que les militants, comme Wolfgang, 25 ans, fêtent leur victoire : "C'est un super résultat, il faut vraiment le dire : absolument historique ! C’est la première fois que le FPÖ est numéro 1 à une élection nationale. Les gouvernements de ces dernières années ont échoué à résoudre les crises et l’électeur veut un changement."

"Dans ce pays, il y a des injustices, des inégalités"

Quand ils apparaissent sur les écrans de télévision, les leaders des autres partis sont hués par la foule. Leo Lugner, l’un des cadres de l’extrême droite, dresse la liste des sujets de mécontentement : la vie chère, le soutien à l’Ukraine, la politique climatique et l’immigration : "Dans ce pays, il y a des injustices, des inégalités. Les gens qui viennent de l’étranger reçoivent de l’argent chaque mois sans rien faire, alors que nos retraités doivent se serrer la ceinture... Ce sont des injustices !" Des "injustices" qui expliquent, selon lui, ce bond de l’extrême droite : plus 13 points, entre 2019 et 2024.

Alors que partout en Europe, l’extrême droite gagne du terrain, le FPÖ autrichien fait mieux que ce que prédisaient les sondages. La journaliste et spécialiste de l’extrême droite, Nina Horaczek, parle de "glissement de l’Autriche vers la droite" : "C’est un tournant historique… Le FPÖ est un parti ouvertement d'extrême droite et a 30 % d'opinions favorables dans notre pays. Au sujet de l’immigration, le FPÖ a promis de faire de l’Autriche une forteresse. Ce qui peut changer aussi, c’est la position de l’Autriche sur la guerre en Ukraine. Le FPÖ est clairement opposé aux sanctions contre la Russie. L'Autriche a fait un pas de géant vers la droite."

"Aucun parti ne veut de Kickl comme chancelier"

Pour l’extrême droite et son leader, Herbert Kickl, le plus dur va maintenant commencer. Le FPÖ va devoir se mettre en quête d’un partenaire pour former une coalition et gouverner. Mission très compliquée, estime Markus Wagner, professeur de sciences politiques à Vienne : "Aucun parti ne veut de Kickl comme chancelier. Il est très radical, il joue toujours avec les théories du complot, quand il parle de la Russie ou de la crise du covid. Kickl est quelqu’un qui joue trop avec les extrêmes. Et puis beaucoup de gens ont peur de ce qui se passerait s’il était au pouvoir."

Avec ou sans l’extrême droite, les négociations pour former un gouvernement seront longues. En 2019, elles avaient duré deux mois.

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