Russie : c'est quand l'hiver ?
En début de semaine, les journaux télévisés russes ouvraient tous leur chronique internationale par des images spectaculaires de tempêtes de neige et de températures polaires en Amérique du Nord.
Le chaos qui régnait dans les rues, dans les aéroports, était largement souligné en sous-entendant que les Russes font mieux face aux aléas météo. Mais derrière les moqueries, une observation revient régulièrement : et chez nous, il arrive quand l'hiver? Car le mois de décembre 2013 et les dix premiers jours de janvier 2014 figureront au «livre des records» en Russie.
Il a fait neuf degrés de plus que la moyenne habituellement observée. C'est simple, le soir du réveillon, il n'y avait pas un flacon de neige visible dans le centre de Moscou. Alors qu'à New York, l'Hudson est bloqué par les glaces, la Moskova et même la Neva à Saint Pétersbourg ne présentent pas le moindre petit glaçon.
Comme souvent, il y a deux manières de réagir à cette curiosité climatique. Les optimistes observent que la Russie fait d'incroyables économies en terme de chauffage. Pensez qu'il ne gèle même pas la nuit à Moscou depuis un mois. Les usines de gaz distribuent 25% de leur capacité et cela suffit largement. Les services de voirie ne sont pas débordés et les accidents de voiture seraient en baisse de 10% par rapport à l'an dernier sur la même période.
Les pessimistes s'inquiètent, eux, d'un climat plus imprévisible que jamais. Il fait doux, il pleut, les sols ne gèlent pas. C'est tout l'écosystème russe habituel qui souffre. Déjà dans le nord du pays, on observe que des villages entiers se retrouvent noyés en été par la fonte du permafrost. Bernard Buigues, le célèbre spécialiste français des mammouths, nous a même dit que des spécimens enfouis depuis des milliers d'années apparaissent à la surface, en raison de cette fonte accélérée.
Ce qui est sûr, c'est que cette absence de conditions hivernales sur la Russie occidentale, en gros jusqu'à l'Oural, pèse aussi sur le moral des habitants. Les vacances scolaires des enfants se terminent et ils ont passé leurs journées dans les appartements à regarder tomber la pluie. Remises à plus tard les descentes en luge, les batailles de boules de neige, les joies de l'hiver...
Même l'église orthodoxe se trouve confrontée à un problème inattendu. Pour la prochaine fête de la Théophanie (pendant orthodoxe de l'épiphanie, NDLR), où creuser les bassins de glace en forme de croix dans lesquels les fidèles vont pouvoir s'immerger?
Cette fête prévue le 19 janvier marque, en principe, l'apogée de l'hiver avec des températures régulièrement inférieures à moins trente degrés. Cette année, on se contenterait volontiers d'un peu de neige et d'un peu de glace qui contribuent si joliment au décor. Mais ce n'est pas certain du tout qu'il y en ait.
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