Haïti : "Moins les institutions fonctionnent, plus ça fait les affaires" de "la mafia nationale et internationale", pointe l'écrivaine Yanick Lahens

Alors que le Premier ministre haïtien a démissionné, mardi, l'écrivaine Yanick Lahens dénonce "une collusion entre une partie de la classe politique" et les gangs.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
Des heurts à Port-à-Prince, la capitale d'Haïti, en février 2024. (RICHARD PIERRIN / AFP)

En Haïti, si le Premier ministre Ariel Henry a démissionné, "c'est beaucoup plus le fait de la violence que d'une pression des partis ou de la société civile", estime l'écrivaine haïtienne Yanick Lahens, mercredi 13 mars, sur France Inter. Depuis Port-au-Prince, la capitale du pays, elle juge que cette démission "a donné aux gangs un certain statut. Ils se sont dit 'maintenant, nous sommes l'armée de libération nationale' ou bien 'on veut faire une révolution'".

L'autrice "pense" que les gangs "ont des commanditaires nationaux et surtout internationaux". En effet, "de par sa position géographique, Haïti est un lieu de passage idéal pour tous les trafics". "Moins les institutions fonctionnent, plus ça fait l'affaire de ces personnes-là", avance-t-elle. Elle dénonce aussi "une collusion entre une partie de la classe politique" et les gangs. "Elle les a instrumentalisés pour pouvoir aller aux élections", souligne-t-elle.

Port-au-Prince, "un monstre qui dévore et cache le reste du pays"

Yanick Lahens, lauréate du prix Femina 2014 pour son roman "Bain de Lune", n'a "jamais connu une telle violence" dans son pays, qui traverse une crise politique et sécuritaire aiguë. "J'habite dans un quartier qui jusqu'à présent est préservé. Je ne peux pas me plaindre autant que ceux dont les maisons ont été pillées, qui ont vu leurs biens disparaître en fumée, qui ont eu des viols ou des blessés" voire "des morts", raconte-t-elle.

À Port-au-Prince, "ce sont les quartiers privilégiés qui sont préservés de cette violence". Ainsi, "les enfants peuvent toujours aller à l'école, il y a même des restaurants qui sont ouverts, il y a des supermarchés, il y a encore des hôpitaux privés qui fonctionnent alors qu'ailleurs, toutes ces infrastructures ont été détruites". "Peut-être que certains commanditaires" de ces violences "habitent ces quartiers", suppose-t-elle.

Il reste toutefois de "l'espoir", selon elle. Cet espoir se trouve "en dehors de Port-au-Prince, qui est un monstre qui dévore et cache le reste du pays". Il y a "un autre pays dans lequel il y a très peu de policiers" voire "pas de policiers du tout, et où les choses fonctionnent". Certaines localités mènent "une sorte d'autorégulation de leur vie" et "prennent des initiatives". Le reste d'Haïti est "autre chose, heureusement".

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.