Reportage En Italie, les tenanciers des plages privées en guerre contre le gouvernement

C’est une des particularités italiennes. Les concessions balnéaires, sur le domaine public, se transmettent en famille depuis des décennies en toute opacité. C'est un sujet de contention entre l'Italie et l'Union européenne depuis près de 20 ans et la directive Bolkestein. Après avoir promis de les soutenir, le gouvernement italien est sur le point de contraindre les “balneari” à répondre à des appels d’offres.
Article rédigé par Bruno Duvic
Radio France
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Temps de lecture : 2min
Des touristes mangeant au restaurant sur la plage privée de Fregene, près de Rome, le 30 mai 2020. (TIZIANA FABI / AFP)

Stefania est une habituée de la plage privée La Bonnaccia. Un parasol, les transats, le parking, elle est abonnée pour la moitié de l’année, un système répandu en Italie. "Ça revient à 1 000 euros la saison", déclare-t-elle. L’établissement de 500 parasols est dans la famille de Michele de Fazio depuis 1962. Mais le patron est d’humeur maussade : "Les politiques, pour se faire élire, ont dit qu'ils renverseraient la table. Et maintenant ils disent qu'ils vont voir ce qu'ils peuvent faire."

Une allusion au gouvernement Meloni, sur le point de remettre les concessions en jeu. Le Conseil d’Etat en Italie vient de juger illégaux les derniers renouvellements automatiques. "Si aujourd'hui je réponds à l'appel d’offres et que je perds, je laisse un patrimoine de 2,5 millions d'euros", peste Michele.

Au fil des années, ces structures se sont développées. Bar, restaurants. Les "balneari" demandent des indemnités pour ceux qui devront plier les parasols, même s’ils payent des redevances très faibles, comme l'a relevé la Cour des comptes en Italie.

Les concessions limiteraient les accès gratuits aux plages

Un peu plus loin, sur le littoral, Maurizio Pasqualoni nous emmène sur l’une des plages publiques d’Ostie, à côté de son établissement. "Là, ce sont les toilettes. On est à trois mètres et on sent déjà l'odeur. Le soir, ici, je n'oserais pas entrer". Autrement dit, les plages publiques ne seraient pas entretenues, à la différence des espaces privés. C’est sa réponse aux nombreux reproches formulés comme quoi les concessions limiteraient les accès gratuits aux plages.

Mais l’entretien des plages publiques est une simple question de volonté politique, estime Roberto del Bove de l’association Mare libero, qui attend beaucoup de la mise en concurrence : "Pendant cette phase de transition, il faut rediscuter de la proportion de plages en accès libre et de plages en concession sur le territoire".

À l’époque où il pensait encore pouvoir défendre les balneari, le gouvernement avait publié une carte du littoral italien : deux tiers d’espaces libres, un tiers en concession. Mais cela incluait notamment des zones rocheuses. Dans certaines régions, en réalité, la proportion est plutôt inverse.

La gestion des plages privées en Italie : reportage de Bruno Duvic

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