Les Jeux olympiques et le ramadan
Avec la coïncidence des dates, le jeune du ramadan, qui devrait durer 12 heures par jour dans la capitale britannique, pourrait poser quelques problèmes. D’autant que cette période d’abstinence alimentaire est l’un des cinq piliers de l’islam.
Les Jeux sont «apolitiques » et «areligieux»
De nombreux pays musulmans ont tenté de protester lors de l’attribution des jeux à la capitale britannique. Mais les règles de laïcité du CIO sont très claires : il n’a donc jamais été envisagé de changer les dates des compétitions.
«Les Jeux sont apolitiques, areligieux», rappelle l’Ivorien Lassana Palenfo, chargé par le Comité international olympique (CIO), dont il est membre, d'aplanir les difficultés avec les comités nationaux les plus inflexibles en matière de respect des traditions. «Si l'on cède, les bouddhistes, les juifs demanderont des aménagement», poursuit-il.
Conséquence : les athlètes «qui ont pour habitude d’effectuer leur mois de jeûne devront faire preuve de courage s’ils veulent concilier activité sportive et spiritualité», note l’Agence islamique internationale de presse, émanation de l’Organisation de la conférence islamique, qui regroupe 57 Etats membres. Le Comité d’organisation des Jeux (Locoq) en a appelé à la vigilance des délégations pour éviter tout incident, explique l’agence.
Restaurants ouverts 24 heures sur 24
Les athlètes ne sont donc pas totalement livrés à eux-mêmes. Le Locoq a ainsi prévu d’apporter, sur chaque site de compétition, des aliments pour que les athlètes puissent rompre le jeûne dès la tombée du jour. Dans le même temps, les restaurants du village olympique fonctionneront toute la nuit.
De plus, un centre multiconfessionnel regroupant les neuf grandes religions (christianisme, islam, judaïsme, bouddhisme, sikhisme, hindouisme, zoroastrisme, jaïnisme et bahaïsme) ainsi qu’un service d'aumônerie a été mis en place au sein du village olympique pour répondre aux attentes des croyants. Et la plupart des Comités nationaux olympiques concernés ont établi des cellules d’aide et de conseil.
Côté français, «peu d’athlètes sont concernés et il n’y a pas de consigne particulière», explique-t-on au Comité national olympique et sportif français (CNOSF). «La nourriture servie dans le village olympique sera adaptée à toutes les nationalités et toutes les religions. De plus, chaque grande discipline dispose d’un staff médical apte à donner des conseils», ajoute-t-on.
«Une affaire entre l’athlète et Dieu»
Chaque compétiteur ne devra pas moins se débrouiller tout seul avec sa conscience. Car en l’absence d’autorité centrale dans l’islam, les règles ne sont pas univoques. Les athlètes musulmans qui se posent des questions devront donc s’adresser aux autorités religieuses de leurs pays respectifs. Et là, tout dépendra de la manière dont le Coran est interprété.
L’une de ces interprétations dispense ainsi de jeûne ceux qui voyagent, ce qui est le cas des sportifs aux JO. Mais ils devront cependant rattraper ultérieurement la période sans nourriture.
«Certains trouveront des religieux et des érudits qui leur fourniront les moyens légitimes pour compenser la rupture du jeune en faisant un travail de charité», explique dans le New York Times Fawaz A. Gerges, directeur du Centre du Moyen Orient à la London School of Economics. Les 72 athlètes marocains ont ainsi été autorisés à ne pas suivre le rituel, à la condition de rattraper «impérativement» les jours où il n'aura pas été respecté. «Une fatwa (avis religieux) a été émise par le Conseil supérieur marocain des oulémas (théologiens) après que ce dernier a été saisi par des sportifs, notamment la sélection de cyclisme», a fait savoir le ministère des Affaires islamiques.
Il en ira sans doute autrement dans des pays conservateurs comme les Etats du Golfe. «Les Jeux olympiques ne sont pas une raison pour ne pas jeûner», a ainsi estimé Sheik Fawzi Zefzaf, un érudit de la fameuse université al-Azhar en Egypte, la plus importante du monde sunnite. Mais pour un autre érudit d’al-Azhar, Abdel-Moeti Bayoumi, «si le jeûne entraîne un épuisement extrême», les athlètes musulmans peuvent choisir de manger. «Au final, c’est une affaire entre l’athlète et Dieu», ajoute-t-il.
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