Cartes Guerre au Liban : où en est l'offensive terrestre israélienne, plus de deux semaines après son déclenchement ?

Article rédigé par Brice Le Borgne
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Des images satellite permettent de documenter les postes avancés de l'armée israélienne au Liban (PLANET LABS PBC)
Des images satellite et vidéos publiées sur les réseaux sociaux permettent de documenter les incursions de l'armée israélienne pour combattre le Hezbollah.

Deux semaines après avoir franchi la frontière, l'armée israélienne poursuit ses opérations terrestres dans le sud du Liban. Le 1er octobre, les soldats de Tsahal ont pénétré sur le territoire libanais, ouvrant une brèche dans la "ligne bleue" contrôlée par la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul). En appui de ces opérations au sol, les raids aériens continuent : mercredi 16 octobre, l'armée israélienne a annoncé avoir frappé plusieurs villes du sud du Liban, ainsi que la banlieue sud de Beyrouth, après que le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a dit être opposé à tout cessez-le-feu.

Les bombardements aériens, qui ont fait plus de 1 300 morts, et les offensives terrestres ont la même finalité pour l'armée : détruire les cibles du Hezbollah, dont des "infrastructures terroristes, des centres de commandement et des installations de stockage d'armes". Des images satellite, des vidéos publiées sur les réseaux sociaux ou les déclarations des différents acteurs permettent de saisir la portée de cette offensive et d'en dessiner les contours. C'est le travail réalisé par l'Institut pour l'étude de la guerre (ISW), un centre de recherche basé aux Etats-Unis dont les membres suivent de près les évolutions des combats sur le terrain.

Carte des opérations israéliennes dans le sud du Liban (BRICE LE BORGNE, PAULINE LE NOURS)

D'après ce recensement, l'armée israélienne a réalisé des avancées à six principaux endroits dans cette partie du sud du Liban, large d'une trentaine de kilomètres. Des percées d'un à deux kilomètres de profondeur, pour certaines à proximité immédiate des positions de la Finul. Elles donnent lieu à de violents affrontements avec le Hezbollah. Plus au nord, Israël continue d'appeler certains villages libanais à évacuer, précédant souvent des bombardements aériens. Dans le même temps, côté israélien, Tsahal a vidé depuis un an une bande de quelques kilomètres de large, transformée pour une bonne partie en zone exclusivement militaire.

Des dégâts visibles depuis le ciel

Plusieurs images satellite de ces derniers jours témoignent aussi d'aménagements de bases opérationnelles israéliennes avancées au Liban. Près de Maroun al-Ras, dans le sud-est du pays, l'armée a élevé des talus et une trentaine de véhicules ont été aperçus sur des images datées du 5 octobre. Ces positions, visibles sur l'image de droite ci-dessous, jouxtent le poste 6-52 de la Finul. Le 6 octobre, la force onusienne s'était dite "profondément inquiète" de ces activités proches de ses positions. "Il est inacceptable de compromettre la sécurité" de ses membres, jugeait-elle sur le réseau social X.

A 600 m au nord-ouest de ces positions, entourées en pointillés blancs ci-dessus, d'importantes destructions ont également été constatées. Il s'agit des vestiges du "Jardin de l'Iran", qui abritait notamment une statue du général iranien Qassem Soleimani. Des images satellites capturées ces derniers mois ainsi que des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montrent que ce lieu a été progressivement détruit par les frappes aériennes, puis rasé par les bulldozers israéliens. Lors de leur incursion le 8 octobre, les soldats israéliens ont planté leur drapeau sur les ruines de ce lieu symbolique.

Quelques kilomètres plus au sud, Tsahal a réalisé une autre percée au travers de la ligne séparant les deux pays depuis 2000. Là encore, des images du 5 octobre témoignent du passage des véhicules israéliens depuis la frontière (en bas à droite de l'image ci-dessous), en direction du village de Yaroun. On y distingue de nouveaux chemins tracés à travers champs, ainsi que des destructions au niveau du village, entourés en pointillés blancs. C'est précisément dans cette zone que le Hezbollah avait annoncé, le 4 octobre, avoir tiré des obus d'artillerie et des roquettes contre les forces israéliennes. 

Dans l'ouest de cette zone frontalière, les Casques bleus de la Finul ont été pris entre les feux d'Israël et du Hezbollah, notamment lors de ces incursions. Deux soldats du maintien de la paix ont été blessés après le tir d'un véhicule blindé israélien vers une tour d'observation du quartier général de la force onusienne à Naqoura, au bord de la Méditerranée, le 10 octobre. Dans la nuit du samedi 12 au dimanche 13 octobre, deux chars israéliens ont pénétré dans la base de Ramyah, selon les Casques bleus. Au total, cinq soldats onusiens ont été blessés en une semaine. La Finul, qui compte 9 500 membres, a dénoncé des "violations choquantes" d'Israël contre ses positions. Son responsable, Jean-Pierre Lacroix, a annoncé garder ses positions malgré les appels d'Israël à quitter les lieux.

Des tirs de plus en plus intenses

Si les images satellite permettent de constater des avancées ponctuelles des soldats israéliens au Liban, "il est difficile de dire si [les soldats israéliens] vont rester sur place", admet Michel Goya, ancien colonel et historien militaire, interrogé par franceinfo. "Pour l'instant, il semble que cela soit des petits raids, visant à détruire toutes les infrastructures du Hezbollah qui se trouvent le long de la frontière." L'armée israélienne peut-elle progresser vers le nord ? "L'idée pourrait être d'essayer d'aller jusqu'au fleuve Litani, mais on n'en est pas là", estime l'expertDans le même temps, les raids aériens israéliens se poursuivent dans la zone allant de la frontière au fleuve Litani, mais également plus au nord.

Depuis le 23 septembre, au moins 1 356 personnes ont été tuées au Liban, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. Les bombardements et l'intensification du conflit ont aussi jeté sur les routes 700 000 Libanais et Syriens habitant dans le sud du pays, d'après les chiffres de l'ONU. Près de 70% d'entre eux sont des femmes et des enfants.

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