Un an après le 7 octobre, que reste-t-il des forces du Hamas ?

Selon Israël, plus des deux tiers des effectifs initiaux du Hamas auraient été mis hors de combat. En réalité, plusieurs bataillons "démantelés" seraient toujours parfaitement opérationnels.
Article rédigé par Eric Biegala
Radio France
Publié
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Un combattant de la brigade Ezzedine al-Qassam, la branche armée du Hamas, le 10 août 2024 au Liban. (MAHMOUD ZAYYAT / AFP)

Il y a un an, le 7 octobre 2023, le Hamas lançait une offensive sans précédent sur le territoire israélien. 2 000 à 3 000 hommes en armes se ruaient sur les kibboutz et villes proches de la bande de Gaza, tuant 1 200 personnes, en enlevant près de 300 autres. Un an et une guerre plus tard, que reste-t-il des forces du Hamas ?

À la tribune des Nations unies, Benyamin Nétanyahou affirmait mi-septembre que 23 des 24 bataillons du Hamas avaient été "démantelés". En août, les forces armées israéliennes donnaient un bilan des affrontements avec les brigades Ezzedine al-Qassam – branche armée du Hamas – et les autres groupes armés présents à Gaza, faisant état de plus de 16 000 morts et 4 500 prisonniers, c’est-à-dire que plus des deux tiers des effectifs initiaux du Hamas – évalués entre 25 000 et 30 000 hommes il y a un an – auraient été mis hors de combat. Sur le papier, les victoires tactiques d'Israël à Gaza sont donc sans appel sauf qu'à y regarder de plus près, les choses sont moins claires.

Des bataillons reconstitués

Début août, une analyse fine et presque granulaire des combats des derniers mois conduite par les journalistes de CNN et les analystes des think tanks américains Critical Threat et Institute for the Study of War peignaient un tableau sensiblement différent avec seulement trois bataillons du Hamas véritablement "démantelés" (comprendre "détruits"), huit bataillons encore parfaitement opérationnels et 13 bataillons toujours capables de lancer des attaques de type guérilla, cela dit peu efficaces.

Pire : les mêmes analystes posaient que sept des bataillons battus dans le nord et le centre de la bande de Gaza dans les premiers mois de la guerre avaient pu être reconstitués pour repartir à l'attaque. Visiblement, le Hamas ne peine pas à renouveler son corps de troupe. Il aura probablement beaucoup plus de mal à remplacer les cadres de ses bataillons et brigades : tous ou presque ont été tués, y compris le patron historique des brigades al-Qassam, Mohammed Deif, tué dans un bombardement ciblé au sein du camp de réfugiés d'Al-Mawasi en juillet.

La gestion d'une bonne partie de l'aide humanitaire

Politiquement, le Hamas, qui gérait littéralement la bande de Gaza avant-guerre, est toujours présent, mais de manière intermittente et pas partout. L'organisation administrative du Hamas a bel et bien perduré, particulièrement dans le nord de la bande de Gaza, à Gaza-ville notamment. "Il leur reste encore quelques moyens gouvernementaux, particulièrement dans le nord de la bande de Gaza", indique Kobi Michael, spécialiste des affaires militaires et de sécurité du think tank israélien INSS.

Une bonne partie de la distribution de l'aide humanitaire – alimentaire, médicale ou autre – qui parvient aux Palestiniens est de fait gérée par le Hamas, qui parfois n'hésite pas à revendre sur les marchés ouverts une partie de cette aide, engrangeant quelques profits au passage. Pour juguler cette emprise, Kobi Michael plaide pour la mise en œuvre d'une administration militaire à Gaza : "Ce serait la seule manière pour nous d'empêcher le Hamas de contrôler la distribution d'aide humanitaire, car ce faisant, ils contrôlent la population et lui signalent qu'ils demeurent une force avec qui il faudra compter après la guerre."

Il y a également quelques témoignages directs d'un système de police géré par le Hamas, incarcérant parfois, dans des ruines de bâtiments bombardés, des Gazaouis qui se seraient rendus coupables de pillages dans les maisons et appartements partiellement détruits par la guerre. L'idée semble être de convaincre les Palestiniens que le Hamas, son administration, restent pertinents à Gaza. Et c'est bien sûr un état de fait que l'État israélien, qui a juré de "détruire" le mouvement, ne peut et ne pourra accepter. Les stratèges politiques et militaires israéliens estiment qu'il leur faudra encore un an avant d'y mettre bon ordre.

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