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Quand la politique et les politiciens inspirent de nouveaux mots…

Quel est le point commun entre les verbes «diendériser», «rocardiser», «to pull a Clinton» ou encore «to handbag»? Ce sont des néologismes qui trouvent respectivement leur origine dans la vie politique burkinabè, française, américaine et britannique.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
Vieille machine à écrire  (BENOÎT BACOU / PHOTONONSTOP)

Le vocabulaire burkinabè s’est enrichi de quelques nouveaux mots au lendemain du coup d’Etat du 16 septembre 2015 et des évènements politiques liés au putsch. «Diendériser», «yayiboniser» ou encore «mackysalliser» sont quelques-uns des nouveaux mots qui circulent à Ouagadougou, rapporte le quotidien panafricain en ligne Afrik.com.

«Diendériser», verbe tiré du nom du général putschiste Gilbert Diendéré, signifie «faire du mal». Dans la même famille, on retrouve le mot «diendérade» que l’on pourrait traduire par «une énorme bêtise», à l'instar d'un «coup d’Etat bête», explique Judicaël Gaël Lompo sur son blog.

Capture d'écran du blog «L'enfant du pays» de Judicaël Gaël Lompo (DR )

Autre mot que le blogueur burkinabè met en exergue, «léoncer» qui signifie «s’assoupir pendant un événement important», comme Léonce Koné, vice-président du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, ancien parti au pouvoir), qui «se serait (endormi) lors de la rencontre avec les médiateurs de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao).»

Le président béninois Yayi Boni, médiateur de la crise burkinabè, a fourni pour sa part le verbe «yayiboniser». Définition: «Faire une grosse promesse que l’on est incapable de tenir.» Il avait promis aux Burkinabè qu’il leur annoncerait «une bonne nouvelle» dans le cadre de la médiation. Les propositions de la Cédéao seront rejetées en bloc par la population.

Dans le même registre, «mackysalliser», à savoir «mentir à de nombreuses personnes à la fois», est dérivé du nom du chef de l’Etat sénégalais Macky Sall, président en exercice de la Cédéao, qui s'est aussi impliqué dans le règlement de la crise au Burkina Faso. 

Peu reluisants
Ce n’est pas la première fois que la politique et ses acteurs enrichissent notre champ lexical. Ainsi dans l'Hexagone, le terme «rocardiser» est défini comme étant le fait de «tuer politiquement un adversaire au sein de son propre camp.» «Le nom de l’ancien Premier ministre de (François) Mitterrand a servi à forger ce néologisme», indiquent les correcteurs du journal Le Monde sur leur blog.

Outre-Manche, l’ancienne Première ministre britannique Margaret Thatcher est à l'origine du verbe «to handbag» (verbe formé à partir du mot anglais «sac à main») qui figure dans le très célèbre Oxford English Dictionary (OED), rappelle la BBC. «Le sac à main de Margaret Thatcher est l'icône d'une ère : une arme utilisée contre les opposants et les infortunés ministres», résume le média britannique. Le verbe «to handbag» désigne le fait qu'un responsable politique (notamment une femme) traite (quelqu’un) ou critique (une idée) de façon impitoyable.
L'ancienne Première ministre britannique Margaret Thatcher, son dernier livre «Statecraft» et son sac à main le 3 avril 2002 à Londres.  (AFP PHOTO Hugo PHILPOTT)

La première utilisation du verbe est répertoriée par l’OED dans The Economist en 1982. «Les chiffres du Trésor, publiés la semaine dernière, montrent combien elle a été impitoyable avec la fonction publique», pouvait-on lire dans la revue. Le «elle» renvoyant à Margaret Thatcher. Fiona McPherson, qui collabore à la rédaction du dictionnaire publié par l'Oxford University Pressfait état d’une utilisation plus ancienne. En 1962, un journal canadien avait déjà fait usage du verbe dans son sens «premier» : «Frapper avec un sac à main». Cependant, estime Fiona McPherson, c’est la référence à Margaret Thatcher qui a rendu le verbe «to handbag» populaire.

Outre-Atlantique, le président démocrate Bill Clinton a également contribué à enrichir le vocabulaire américain. «To pull a clinton»faire passer un mensonge pour une vérité – s'est imposé dans le champ lexical politique et médiatique après ses déclarations dans l’affaire Monica Lewinsky. L'expression avait déjà été employée dans la même assertion, mais sous une autre forme  – «to pull a Bill Clinton»  –, lors du débat qui oppose le vice-président de George H.Bush, Dan Quayle, à celui qui deviendra celui de Bill Clinton, Al Gore, en 1992. Après plusieurs semaines de dénégation en 1998, l’ancien président démocrate admettra que si ses propos antérieurs étaient «recevables sur un plan légal», ils constituaient néanmoins un mensonge puisqu’il avait effectivement eu une relation «inapropriée» avec Monica Lewinsky. 

Par ailleurs, comme l’explique le site d'informations Politico«to pull a clinton» signifie aussi réussir à faire un comeback politique ou à retourner une situation politique à son avantage comme Bill Clinton l'avait fait au milieu des années 90.

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