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Le Royaume-Uni face à une grève inédite des infirmiers et infirmières du service public : "Ils ne font rien pour régler le problème"

Après les chemins de fer mardi et mercredi, les infirmiers et infirmières britanniques plantent à leur tour le piquet de grève, du jamais vu au Royaume-Uni. Face à la crise du coût de la vie et du système public de santé, ils réclament 19% d’augmentation de salaire.
Article rédigé par Richard Place - édité par Ariane Schwab
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
"Enough is enough" (Trop c'est trop). Le principal syndicat des infirmiers et infirmières britannique, le Royal College of Nursing (RCN), a lancé un mouvement de grève inédit dans le pays, le 15 décembre 2022. (ROYAL COLLEGE OF NURSING (RCN))

À Londres, l’hôpital fonctionnera normalement mais Holly tiendra le piquet de grève à l’entrée de l’établissement où elle accompagne des patients malades du cancer. Elle n’en peut plus de voir ses conditions de vie et de travail se dégrader. La colère est profonde. Elle sait que des patients attendent un diagnostic, une analyse, un traitement depuis des mois. Son service ne peut plus faire face. 

>> La grève s'annonçait depuis le mois d'octobre

Plus de sept millions de rendez-vous sont en souffrance au niveau national. Face à la pénurie de personnel soignant, les hôpitaux font appel à des intervenants extérieurs payés très cher, voire détournent les malades vers des établissements privés. "Ils dépensent beaucoup d’argent dans les soins privés mais ils ne font rien pour régler le problème à la base, dénonce Holly. Ils ne retiennent pas les effectifs et ils ne recrutent pas non plus."

Une privatisation rampante, voilà ce que dénonce Holly et ses collègues. Au point d’entamer jeudi 15 décembre la première grève de l’histoire du syndicat Royal College of Nursing (RCN) en 106 ans d’existence. Jusqu'à 100 000 infirmiers et infirmières doivent participer au mouvement qui touche l'Angleterre, le Pays de Galles et l'Irlande du Nord.

Dénoncer cette privatisation rampante, c’est aussi le discours de l’association présidée par Tony O’Sullivan, Keep our NHS public (Gardons notre service de santé public). Anciens ou actuels membres des services de santé, ils pointent la responsabilité des gouvernements sur les dernières années qui appauvrissent les soins publics pour mieux se tourner vers le privé. "La valeur des salaires a baissé de 20%, pointe Tony O’Sullivan. Ces employés ont des enfants, ils doivent payer leurs factures".

"En fait, on les pousse à quitter le service public pour aller dans le privé."

Tony O’Sullivan, président de Keep our NHS public

à franceinfo

"Et l’on demande au secteur privé de s’occuper des listes d’attente dans les hôpitaux", enfonce Tony O’Sullivan. La pandémie a aggravé la situation d’un service de santé publique déjà à l’agonie. Face à l’interminable attente, les patients se tournent de plus en plus vers le privé : +40% selon les derniers chiffres officiels. Il faut alors payer de sa poche. 

Les infirmières demandent une augmentation des salaires représentant un peu plus de 19% pour rattraper une baisse de leur pouvoir d'achat de 20% depuis 2010 et l'arrivée des conservateurs au pouvoir. Une demande jugée "inabordable" par le gouvernement conservateur, qui promet de légiférer pour réduire la marge de manœuvre des syndicats. Le ministre de la Santé Steve Barclay a jugé le maintien du mouvement "profondément regrettable" et assuré dans un communiqué que sa "priorité N°1" était la sécurité des patients.

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