: Reportage "Charles n'est pas mon roi" : en Irlande du Nord, la visite de Charles III divise les habitants de Belfast
Nouvelle étape difficile pour Charles III. Le nouveau roi se rend, mardi 13 septembre, en Irlande du Nord, où des cris de joie ont retenti à l'annonce de la mort de sa mère Elizabeth II.
Vive le roi ou pas ? Tout dépend du quartier de Belfast. La capitale d'Irlande du Nord marquée par trente ans de conflit entre unionistes et républicains - souvent réduits à une guerre entre catholiques et anglicans. Au pied d'une immense peinture murale en hommage à la défunte reine Elizabeth II, côté loyaliste, donc, une montagne de bouquets de fleurs.
"Maman, va-t-on voir le roi ?" demande Penny, sept ans. Sa mère ne la mettra pas à l'école, ce mardi 13 septembre, pour ne pas rater la visite de Charles III - moment d'histoire cinq jours après la mort d'Elizabeth II. Le nouveau souverain arrive d'Édimbourg où les Écossais ont rendu un dernier hommage à la reine.
Dans ces rues où l'Union Jack flotte au vent, on ne comprend toujours pas que certains habitants des quartiers catholiques aient pu célébrer la mort de la reine. "Le soir de son décès, à quelques rues de là, ils ont fait des feux d'artifice, ils ont fait la fête, raconte la mère de Penny. Ça ne se fait pas."
Tout près d'ici, Falls Road - quartier républicain. "Charles n'est pas mon roi", affirme Cory, un électricien de 23 ans. Il considère ne pas être "en Irlande du Nord ici, mais en Irlande tout court."
Le poids d'un conflit fratricide marqué par le Bloody Sunday
Une maman tire son enfant par la manche. Elle non plus ne veut pas entendre parler de la monarchie : "Trop de mauvais souvenirs." En fait, on n'ose à peine ces jours-ci évoquer entre voisins la mort de la reine et l'arrivée de Charles III. "Il y a quand-même une sorte de silence, le non-dit, un peu le tabou, on a très peur d'offenser", explique Claire Moran, qui vit dans un quartier mixte et enseigne le français à l'université de Belfast.
En Irlande du Nord, à un moment, on a oublié le conflit et là, ça revient et on voit que ce n'est jamais vraiment parti
Claire Moran, enseignante de français à l'université de Belfastà franceinfo
Surtout pas de mauvaises blagues pour ne froisser personne. Mais dans les pubs de Belfast, les langues se délient. "Fuck the king, fuck the king and fuck the queen." Pas vraiment besoin de traduire les injures de Tony. "Qu'on nous laisse tranquille", demande l'Irlandais.
Peter ajoute que l'Angleterre est, pour lui, "un pays étranger" et qu'"en tant que chef des armées, le nouveau roi Charles continue de porter la responsabilité du Bloody Sunday". Ce dimanche 30 janvier 1972, 14 militants pour les droits civiques, dont sept adolescents, ont été tués par l'armée britannique dans la répression d'une manifestation pacifiste à Derry. Peter espère que l'Ecosse votera l'an prochain son indépendance, montrant l'exemple à l'Irlande du Nord.
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