Russie : la hausse des taux d'intérêt pourrait ne pas suffire à renforcer le rouble, estime un expert de l'économie russe
"La hausse des taux d'intérêt est la première arme de la Banque centrale qui la teste en espérant que cela suffise", affirme mardi 15 août sur franceinfo Julien Vercueil, maître de conférences à l'INALCO et auteur de Économie politique de la Russie. Selon lui, la chute des exportations pétro-gazières "de 41 %" explique l'effondrement du rouble, parce que ses "détenteurs les vendent car ils considèrent que la monnaie n'est pas stable".
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franceinfo : Quelles sont les principales raisons de la chute du rouble ?
Julien Vercueil : La raison immédiate, c'est un affaiblissement de l'excédent des transactions courantes de l'économie de la Russie, c'est-à-dire, les exportations, les importations, les revenus de services et les revenus du travail. Cet excédent avait été extrêmement élevé en 2022 puis il a été divisé par neuf en 2023, par rapport au premier semestre de l'année précédente. Il y a un effet des sanctions. Il est de plus en plus difficile pour la Russie de vendre son pétrole au-delà de la barre des 60 dollars le baril, qui est la limite à partir de laquelle l'Europe et les États-Unis cessent d'autoriser les opérateurs de leur région à acheter le pétrole russe.
Le fait que certains pays, comme l'Inde, la Chine ou l'Arabie saoudite, contournent les sanctions contre Moscou n'y change donc rien ?
Il reste plus difficile pour la Russie d'exporter. Cette année, les exportations pétro-gazières ont chuté de 41 %, sur les sept premiers mois. Cela entraîne des anticipations de la part des détenteurs de roubles qui les vendent car ils considèrent que la monnaie n'est pas stable. Ces ventes accélèrent la chute du rouble.
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Est-ce que le fait que la Banque centrale russe ait relevé le taux directeur à 12 % va limiter la chute du rouble ?
En avril 2022, la hausse des taux d'intérêt à 20 % de la Banque centrale n'avait pas suffi à arrêter la fuite des capitaux. C'est un contrôle des taux de change drastique, c'est-à-dire l'interdiction aux entreprises et aux particuliers russes d'acheter des devises étrangères, qui avait arrêté cette fuite. Aujourd'hui, ce contrôle a été allégé. La hausse des taux d'intérêt est la première arme de la Banque centrale, qui la teste en espérant que cela suffise mais elle a en réserve d'autres moyens qu'elle pourrait utiliser.
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