Sur les bords du lac Tchad, les victimes de Boko Haram témoignent
Nous sommes samedi. C'est jour de marché aujourd’hui à Baga Sola. Les pirogues accostent sur la rive pour débarquer le poisson pêché dans le lac Tchad ou des bidons remplis de lait caillé. La petite ville de Baga Sola a été visée par un triple attentat suicide en octobre dernier, dont un sur le marché qui a fait 15 morts et une quarantaine de blessés.
Depuis, les habitants des villages alentours désertent le marché au poisson.* Le souvenir de l’attentat reste encore très présent parmi les commerçants, traumatisés. "Le jour de l'attentat, on était recouvert de la chair et du sang des gens. Plein de sang. Je n'ai pas été blessé mais j'ai eu très peur".*
Pour lutter contre les attaques de Boko Haram, les habitants de Baga Sola ont mis sur pied des comités de vigilance à l’entrée du marché. A l'image de cette femme, qui explique qu'elle fouille les dames, "que ce soit des vieilles femmes, des petites filles et même des nouveau-nés. Le gouvernement a interdit la burqa, c'est une bonne décision. Les gens en profitaient pour se faire exploser."
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A une demi-heure de piste de Baga Sola, le camp de Dar es Salaam (cela signifie la Maison de la Paix) se dresse au milieu d’une étendue désertique balayée par un vent brûlant. Cinq mille réfugiés nigérians y vivent dans des conditions difficiles. Il fait 45 degrés en ce moment. Sous une tente installée par l’UNICEF, des enfants dessinent ce qu’ils ont vécu. Abakar, 12 ans vient d’une ville du Nigéria, attaquée il y a un an par Boko Haram. Des centaines de civils y ont été massacrés. "Ici, c'est un Boko Haram. Il a fusillé un homme qui voulait s'enfuir dans sa maison. Le rouge là, c'est le sang. Là c'est moi, je cours pour aller dans la pirogue. Là, c'est une personne qui a été égorgée par Boko Haram."
A côté de ces milliers de déplacés et de réfugiés, il y a aussi les victimes directes de Boko Haram. Agée de 10 ans, Salta se trouvait sur le marché de Baga Sola au moment de l'attaque. Salta a perdu un bras mais elle ne se souvient de rien. "Avant l'attentat, j'aidais ma mère pour aller chercher du bois, de l'eau, laver les tasses. Je ne peux plus rien faire. Je ne peux pas jouer non plus avec les autres petites filles." Le risque pour Salta, c'est d’être rejetée, marginalisée par sa communauté. La double peine des victimes de Boko Haram.
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