Edouard Philippe soutient les forces de l’ordre : « Le basculement de la République n’est pas si loin. »
La séance de questions d’actualité au gouvernement a été marquée par les interrogations des sénateurs autour du racisme dans les forces de l’ordre. La droite sénatoriale estime que le gouvernement cède aux sirènes du communautarisme ou à « la loi de la jungle », alors que la gauche demande des « réponses structurelles pour rompre avec les pratiques racistes » qui existent au sein de la police.
La présidente du groupe communiste, Eliane Assassi, a interrogé le Premier ministre au sujet des réponses qu’entendait apporter le gouvernement aux mobilisations actuelles dénonçant le racisme des forces de l’ordre. « L’impunité doit cesser » a martelé la sénatrice de la Seine-Saint-Denis, avant d’ajouter : « Les traitements discriminatoires existent dans la police comme dans la société à la nuance près que les policiers sont dépositaires de la violence légitime, au point qu’elle en devient parfois illégitime. » Eliane Assassi a finalement interpellé le Premier ministre : « Quelle réponse structurelle comptez-vous apporter pour rompre définitivement avec ces pratiques racistes et d’une violence disproportionnée au sein de la police ? »
Une « ligne d’équilibre »
Edouard Philippe a tenu à développer une « ligne d’équilibre » entre un soutien affiché aux forces de l’ordre et une « exigence » envers les forces de l’ordre sur les questions de discrimination. La fin de la réponse du Premier ministre revêt tout de même une fermeté certaine à l’égard des mobilisations actuelles : « Je ne laisserais jamais dire que la police ou la gendarmerie, elles ne sont ni l’une ni l’autre. Ces institutions sont extrêmement contrôlées, placées sous l’œil vigilant des médias, de nos concitoyens et d’organismes internes de contrôle. »
« Si nous acceptons que la présomption passe de celui qui trouble l’ordre public à celui qui le défend, c’est un basculement de la République qui intervient. »
Edouard Philippe en a aussi profité, au cas où « sa réponse soit entendue en dehors de l’enceinte [du Sénat] », pour regretter une forme de radicalisation du débat : « Je ne veux pas que ce débat soit comme confisqué par des prises de positions théâtrales par des raccourcis ou des amalgames que nous avons tous dénoncés. Nous devons être confiant, respectueux et exigeants. » Un refus de la radicalisation des débats qui n’a pas empêché le Premier ministre d’adopter un ton assez grave : « L’émotion est légitime, mais si nous acceptons que la présomption passe de celui qui trouble l’ordre public à celui qui le défend, c’est un basculement de la République qui intervient. Et quand je vois cela je me dis que ce basculement de la République n’est pas si loin. »
Racisme dans la police : Édouard Philippe défend Castaner et Belloubet
« Écroulement civique », « fragilisation de l’État de droit », « porte ouverte à la loi de la jungle » Lors des questions d’actualité au gouvernement, le président du groupe LR du Sénat, Bruno Retailleau n’a pas mâché ses mots et a vertement fait part de sa réprobation vis-à-vis des choix de l’exécutif, confronté depuis 10 jours à des vagues de manifestations contre la violence et le racisme chez les forces de l’ordre (voir notre article). « Nous devons être intraitables contre le racisme (…) Mais sans tomber dans les pièges de ceux qui veulent communautariser la France » a-t-il clamé.
Le Premier ministre a répondu point par point aux interrogations du sénateur LR de Vendée. En ce qui concerne la proposition de la garde des Sceaux de recevoir la famille d’Adama Traoré mort en 2016 pendant une interpellation, Édouard Philippe assure qu’il ne s’agissait pas d’ « une immixtion dans la procédure » et rappelle que Nicole Belloubet n'a pas invité la famille d'Adama Traoré mais son comité de soutien. « Si à l’invitation d’un membre de la famille, la garde des Sceaux donnait une instruction individuelle alors nous serions dans quelque chose qui n’est pas légal » a-t-il justifié.
Au sujet de l’expression « soupçon avéré de racisme» prononcé par Christophe Castaner en début de semaine, qui entraînerait « la suspension systématique » des fonctionnaires de police et gendarmerie », Édouard Philippe estime qu’il s’agit ni plus ni moins de « la pratique administrative actuelle ». « Que se passe-t-il quand des faits qui n’ont pas donné lieu à une déclaration de culpabilité, sont susceptibles de troubler l’exercice du service public ? L’autorité administrative peut et souvent doit prendre des mesures avant la déclaration de culpabilité. Des mesures de suspension par exemple (…) Ce n’est en rien une méconnaissance du principe de la présomption d’innocence.(…) C’est la pratique constante dans l’administration ». « L’autorité administrative est dans son droit lorsqu’elle suspend des agents » a-t-il répondu.
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