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Mort de George Floyd : les manifestants veulent ''la justice raciale et la justice sociale face à des décennies d'abandon", selon une historienne

Les manifestations se multiplient après la mort de cet homme noir lors d'une arrestation par un policier. Ce que les protestataires espèrent, "c'est de ramener sur le devant de la scène ces questions" d'inégalités, explique la spécialiste Caroline Rolland-Diamond.

Article rédigé par franceinfo
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Des manifestants à Minneapolis, le 29 mai 2020. (CHANDAN KHANNA / AFP)

"Ce que cherchent les manifestants et ce qu'expriment les protestations violentes à l'échelle du pays, c'est la justice. La justice raciale et la justice sociale face à des décennies d'abandon", analyse samedi 30 mai sur franceinfo Caroline Rolland-Diamond, professeure d'histoire des États-Unis à l'université Paris Nanterre, spécialiste en histoire africaine-américaine. Des manifestations parfois violentes ont lieu aux États-Unis, depuis la mort d'un homme noir, George Floyd, lors de son arrestation par la police à Minneapolis (Minnesota).

>> Mort de George Floyd : de nouvelles manifestations, suivez la situation en direct

franceinfo : Y a-t-il un sujet "police" en particulier, ou est-ce le reflet d'un clivage général dans la population ?

Caroline Rolland-Diamond : Il y a un sujet "police" en particulier, parce que c'est ce qui tend la situation. La police représente évidemment l'État, un État qui a abandonné très largement la population noire depuis des décennies. C'est un problème de très longue date, mais il a aussi évolué. La police n'a pas les mêmes relations aujourd'hui avec la communauté noire qu'elle l'avait dans les années 60 ou dans les années 30.

On a assisté depuis les dernières décennies, et surtout depuis les années 80, à une militarisation de la police, à un développement de politiques répressives encore plus agressives de la part des départements de la police. Et dont on a la traduction aujourd'hui, avec l'épisode qui a conduit à la mort de George Floyd.

Que cherchent à obtenir les manifestants, puisque le policier incriminé a été arrêté ?

L'arrestation du policier est finalement rapide au regard de l'Histoire. Souvent, il a fallu attendre de très longs mois pour obtenir la moindre arrestation, quand il y avait arrestation. Mais il a été mis en accusation pour "third-degree murder" [homicide involontaire], qui n'est pas le chef d'accusation recherché par la famille de George Floyd. Elle demande le chef d'"homicide volontaire".

Mais ce n'est pas le problème. Ce que cherchent les manifestants et ce qu'expriment les protestations violentes à l'échelle du pays, c'est la justice. La justice raciale et la justice sociale face à des décennies d'abandon. Les inégalités aux États-Unis qui touchent les Noirs ne touchent pas que les relations avec la police. Effectivement avec la police, ils sont victimes de harcèlement, d'arrestations arbitraires, voire de violences qui entraînent la mort. Mais il y a des problèmes d'inégalités raciales extrêmement fortes, qui touchent l'emploi, le logement, les écoles, la santé, on l'a vu avec la crise du Covid-19.

Tous ces éléments, c'est ce qui fait déborder cette colère, qu'on voit actuellement dans les rues. Le mouvement Black Lives Matter, qui était apparu suite à la mort de Michael Brown en 2014, avait permis de porter ce message, cette colère, cette exaspération et ce désespoir devant l'absence de politique publique. Un désespoir qui est encore plus fort parce que les Noirs américains se rendent compte que, quel que soit le parti au pouvoir, rien ne change. On est sortis de huit ans de présidence Obama et maintenant de quatre années de présidence Trump. Justement, ce qu'ils espèrent, c'est de ramener sur le devant de la scène des questions, des enjeux de fond par des moyens désespérés de violence, mais qui, peut-être, va relancer la conversation.

Donald Trump est accusé par toute une partie de la population d'attiser les violences racistes et le clivage dans le pays...

Ces accusations me semblent fondées. Depuis son arrivée au pouvoir et même avant son arrivée au pouvoir, il a tenu des propos qui attisaient la haine raciale. Il a soutenu publiquement des suprémacistes blancs notoires. Encore dernièrement, avec son dernier tweet, où il reprenait une citation qui datait des années 60, de cet élu de Miami qui disait que quand il y avait eu des violences, des pillages, la police était justifiée pour utiliser la force. Donc là, ça ravive encore des tensions raciales très fortes. La présence de Trump au pouvoir a semblé donner champ libre à l'expression de violence contre les Noirs, encore plus massive.

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