Caravane de migrants vers les États-Unis : le facteur familial force certains à "revenir au Honduras"
Alors que des milliers de Honduriens se dirigent vers les Etats-Unis, certains ont fait demi-tour après les menaces de Donald Trump de déployer l'armée à la frontière. Pour Gérard-François Dumont, géographe, certains renonçeraient aussi car ils ne pourraient pas faire venir leur famille dans le pays.
Le facteur familial est "un frein à la migration" et force certains migrants à "revenir au Honduras", a indiqué, samedi 27 octobre sur franceinfo, Gérard-François Dumont, géographe, économiste et démographe, professeur à Paris IV-Sorbonne. Parmi les milliers de Honduriens en route pour les États-Unis, certains rebroussent chemin face aux menaces du président américain Donald Trump de déployer 800 militaires à la frontière pour les empêcher de passer.
Si certains migrants renoncent, Donald Trump aura-t-il gagné ?
Gérard-François Dumont : Oui, dans une certaine mesure. Il a bien prévenu que les États-Unis, comme la majorité des pays dans le monde, effectuent des contrôles à l'entrée du pays. À priori, il semblerait que la plupart de ces migrants n'ont pas de papiers leur permettant d'entrer aux États-Unis. La seule chose qu'ils pourraient faire, c'est déposer une demande d'asile, mais ça suppose qu'ils puissent avoir des preuves qu'ils sont persécutés dans leur propre pays. Ils se rendent compte que la situation est difficile pour eux face à une politique migratoire des États-Unis qui a changé par rapport à la période précédente, à la période de Barack Obama. Mais il faut rappeler que [l'ancien président] a expulsé des États-Unis beaucoup plus de migrants que George W. Bush pendant la même durée de présidence.
Ces migrants fuient surtout le Honduras ?
Effectivement. Comme toujours, ce type de migration, c'est pour la paix et la liberté, c'est-à-dire que pour eux, ils ont un régime liberticide avec une quasi dictature, incapable de maintenir un minimum de sécurité dans le pays, compte tenu de tous les trafics de drogue organisés par les mafias. Il y a une très forte criminalité, donc une très forte insécurité, des taux d'homicides extrêmement élevés, et puis un pouvoir autoritaire et corrompu. Et en même temps, il n'y pas non plus d'espoir dans les pays voisins. Le Nicaragua avait une démocratie relativement correcte, mais est en train de tourner à la dictature, avec des manifestants qui se font tuer par les milices du président. Le Salvador, à côté, est dans une situation difficile et a du mal à se remettre de la longue guerre civile qu'il a connue. Le Honduras est le pays le plus pauvre de toute l'Amérique centrale. Ce n'est pas étonnant que ce soit de ce pays le plus pauvre qu'il y ait un souci de surmonter cette pauvreté, dans la mesure où la mauvaise gouvernance du pays ne permet pas de le faire.
Le poids de la famille chez certains de ces migrants peut-il aussi les pousser à renoncer ?
Ces migrants sont extrêmement différents des migrants africains qui viennent en Europe, parce que ces derniers ont tous un téléphone portable ou un smartphone. Il semblerait que ces personnes qui quittent le Honduras n'ont pas de téléphone et ne peuvent pas joindre régulièrement leur famille pour les rassurer sur leur sort. Dans la mesure où ils craignent de ne pas pouvoir entrer aux États-Unis, d'avoir un certificat de résidence, ça veut dire qu'ils ne pourront pas faire venir leur famille. C'est un frein à la migration et cela explique que certains envisagent de revenir au Honduras.
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