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Malgré le rebond de l'économie américaine, Donald Trump reste "entraîné dans les polémiques sans fin"

Donald Trump "devrait bénéficier politiquement" des bons chiffres actuels de l'économie américaine mais le président des Etats-Unis "est entraîné par son caractère dans des polémiques sans fin", a estimé vendredi sur franceinfo Corentin Sellin, professeur agregé d'histoire et spécialiste des Etats-Unis.

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Donald Trump lors d'un meeting à Billings, dans le Montana, le 6 septembre 2018. (NICHOLAS KAMM / AFP)

Selon les derniers chiffres publiés, le taux de chômage aux Etats-Unis s'est établi à 3,9% au mois d'août 2018. 200 000 emplois ont été créés pendant ce même mois et le pays a vu la plus forte augmentation du salaire horaire moyen sur un an depuis 2009. 

Des chiffres dont Donald Trump "devrait bénéficier politiquement", mais le président des Etats-Unis "est entraîné par son caractère dans des polémiques sans fin", a estimé vendredi 7 septembre sur franceinfo Corentin Sellin, professeur agregé d'histoire et spécialiste des Etats-Unis.


franceinfo : Est-ce qu'on doit vraiment ces bons chiffres à Donald Trump ?

Corentin Sellin : Il n'est pas question, parce que ce serait Donald Trump, de nier le fait que l'économie des Etats-Unis est florissante sous son mandat. On est au plein emploi, avec des chiffres qui n'avaient pas été atteints depuis la fin de la décennie glorieuse des années 1990. Même si Trump n'y est peut-être pas pour grand chose, ça se passe sous son mandat et il devrait en bénéficier politiquement comme ses prédécesseurs.

D'un autre côté, on peut aussi dire qu'il exagère beaucoup en s'appropriant l'exclusivité de cette réussite économique. En effet, le rythme de création d'emplois et le rythme de croissance est assez similaire à celui qu'il était lors des 18 derniers mois de présidence Obama. Il n'y a pas eu de grand changement et Donald Trump exagère donc un petit peu, comme toujours, en s'appropriant à lui seul cette réussite économique.

Quelles seront les conséquences du virage protectionniste entamé par Donald Trump sur ces bons chiffres d'emplois ?

C'est le grand enjeu parce que, une fois de plus, c'est Donald Trump contre les économistes. Il a beau jeu aujourd'hui de rappeler que de très célèbres économistes avaient signé avant son élection des tribunes annonçant le chaos économique s'il était élu. Aujourd'hui, on voit bien qu'il n'en est rien.

Sur le protectionnisme, rebelote. Beaucoup d'économistes, et parmi les plus prestigieux, disent aujourd'hui que ces mesures vont coûter cher en termes d'emplois. On voit effectivement quelques entreprises, comme Ford par exemple, qui annoncent des suppressions d'emplois aux Etats-Unis à cause des tarifs protectionnistes et de la guerre commerciale, en particulier contre la Chine et l'Union européenne, mais ça ne se reflète pas pour l'instant. Toute la question politique est de savoir, si ça se voit, quand est-ce que ça se verra dans le bilan du chômage.

Est-ce que ces bons chiffres vont pouvoir servir aux Républicains pour les élections de mi-mandat, prévues en novembre ?

Oui et ça devrait aussi être le seul axe de campagne de Donald Trump. Les chiffres du mois d'août sont absolument remarquables, ils sont même meilleurs qu'attendus. Donald Trump, en toute logique, devrait faire campagne avec les élus républicains uniquement sur ce thème mais il ne peut pas supporter toutes les polémiques, comme le livre de Bob Woodward ou la tribune anonyme publiée contre lui. Il est entraîné par son caractère dans ces polémiques sans fin, s'éloignant de ce qui devrait être vraiment sa seule boussole politique, cette réussite économique qui a lieu sous son mandat.

C'est un peu ce que lui reprochait la fameuse tribune anonyme du New York Times : elle célébrait les résultats économiques et diplomatiques de la présidence Trump tout en disant qu'ils avaient été obtenus en dépit de la personnalité fantasque du président. Trump l'illustre encore : aujourd'hui, il ne devrait parler que du plein emploi, de la croissance florissante et même des salaires, dont l'augmentation redémarre. De quoi parle-t-il ? De s'il a vraiment dit ce qui est affirmé dans le livre de Woodward et ce dont, sans doute, beaucoup d'Américains moyens se fichent un peu. C'est ce qui est très étonnant : sa personnalité éclipse ce qui devrait être la boussole de sa présidence.

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