Manifestations, polémiques et réformes avortées : les cent premiers jours de Donald Trump, recordman de l'impopularité
Jamais aucun président américain n'a été aussi impopulaire trois mois après le début de son mandat. Franceinfo revient sur l'installation houleuse de Donald Trump à la Maison Blanche.
"Un critère ridicule." A en croire un tweet (en anglais), publié vendredi 21 avril, Donald Trump se moque de la règle des cent jours. Les médias américains ont pour tradition de dresser un bilan après cette durée symbolique, qui tombe samedi 29 avril pour le 45e président américain. Dans ce cas précis, une évidence s'impose : en à peine trois mois, Donald Trump a chamboulé toutes les habitudes de Washington.
Polémiques, conflits d'intérêts, manifestations monstres, tensions internationales... Le président américain n'a même pas eu droit à 24 heures d'état de grâce. Franceinfo revient, à travers sept dates emblématiques, sur les cent premiers jours houleux de Donald Trump à la Maison Blanche.
Jour 2 : le pays se mobilise (déjà)
Une journée. Donald Trump a droit à une journée de répit avant de tomber sur un os. Et il est de taille : plus de 500 000 personnes défilent à Washington pour défendre les droits des femmes, samedi 21 janvier. Au total, quelque quatre millions d'Américains participent à ces "Marches des femmes"dans tout le pays, accusant Donald Trump de vouloir entraver les libertés individuelles. Selon des politologues cités par le Guardian (en anglais), il s'agit de la plus importante journée de manifestation de l'histoire américaine.
Au même moment, la nouvelle administration tente un coup de force en termes de communication. Alors que les médias estiment que 250 000 personnes se sont réunies pour son investiture, Donald Trump assure que "cela avait l'air d'un million et demi de personnes". C'est le premier d'une longue liste d'improbables "faits alternatifs", des affirmations erronées annoncées par la présidence en dépit des vérifications des médias.
Jour 15 : la justice bloque son décret sur l'immigration
Donald Trump veut agir vite. Durant les deux premières semaines de son mandat, le milliardaire signe une dizaine de décrets, dont un interdisant l’entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays musulmans. Mais le "Muslim ban", censé être une mesure emblématique, devient l'un de ses plus cuisants échecs. Alors que des manifestations s'organisent, plusieurs associations de défense des droits déposent des recours contre le texte devant la justice. Et le vendredi 3 février, un juge fédéral annule le décret, jugé contraire à la Constitution.
Un revers qui aurait pu être évité si Donald Trump avait associé son administration à sa réflexion. Le secrétaire à la Sécurité intérieure n'a appris qu'à la dernière minute les détails de ce décret, rapporte ainsi CNN (en anglais). Le département de la Justice n'ayant pas été consulté, des étrangers disposant de papiers en règle ont été arrêtés jusqu'à ce qu'une juge new-yorkaise ordonne leur libération. Autant de dysfonctionnements qui illustrent le désordre qui règne à la Maison Blanche. Donald Trump décide de signer un deuxième décret anti-immigration, lundi 6 mars. Peine perdue : le texte est, lui aussi, annulé par une cour fédérale.
Jour 25 : son conseiller à la sécurité est poussé vers la sortie
Il faut moins d'un mois pour que la présidence de Donald Trump soit éclaboussée par une première affaire d'ampleur. Michael Flynn, conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, est contraint de présenter sa démission, lundi 13 février. Quatre jours avant, le New York Times et le Washington Post ont révélé qu'il avait eu des contacts inappropriés avec la Russie. Il aurait négocié par téléphone avec l'ambassadeur de Russie à Washington en décembre, soit plusieurs semaines avant l'investiture de Donald Trump. Une pratique prohibée par le Logan Act de 1799, qui interdit aux simples citoyens de négocier avec des autorités étrangères.
Le départ de Michael Flynn ne règle pas tout. Des documents, publiés jeudi 16 mars au Congrès, révèlent que l'ancien conseiller à la sécurité nationale a reçu en 2015 plus de 50 000 dollars (un peu plus de 45 000 €) de la part de trois entreprises russes ou liées à la Russie. L'ancien général a, depuis, proposé de s'expliquer devant les commissions parlementaires enquêtant sur d'éventuelles interférences de la Russie dans l'élection présidentielle américaine.
Jour 63 : la réforme de l'Obamacare échoue
Sur le papier, Donald Trump dispose d'un atout non négligeable pour diriger le pays : une majorité au Congrès. Mais la réalité s'avère autrement difficile. Alors que le nouveau président a promis d'abroger l'Obamacare, les républicains échouent à réunir les 216 votes nécessaires à la réforme du système de santé, jeudi 23 mars. Le revers est de taille pour Donald Trump, qui en avait fait l'une de ses promesses de campagne. Le parti est divisé, comme l'explique le Washington Post (en anglais). Les plus conservateurs veulent la suppression pure et simple du système d'assurance santé et refusent tout compromis avec les démocrates. Certains modérés envisagent, eux, de simplement amender la loi.
Le manque d'organisation à la Maison Blanche ne facilite pas l'avancée du dossier. "Trump est historiquement impopulaire, manque d'expérience pour gouverner et s'entoure de conseillers néophytes", résume le Washington Post. Même le chef de file des républicains à la chambre des représentants ne peut que constater le manque d'efficacité de sa majorité. "Les républicains doivent passer d'un parti d'opposition à un parti qui gouverne", résume-t-il.
Le parti doit, en outre, composer avec une opposition inquiète de voir 24 millions d'Américains privés de couverture santé d'ici à dix ans si l'Obamacare est supprimé. L'administration Trump préfère désormais faire de la réforme fiscale sa priorité. En promettant toutefois de proposer un nouveau projet de réforme de l'Obamacare d'ici peu, note le Guardian (en anglais).
Jour 77 : Trump ordonne une frappe surprise en Syrie
Donald Trump a fait campagne en prônant la fin de l'interventionnisme américain à l'étranger. Mais le président change d'avis dans la nuit du jeudi 6 au vendredi 7 avril. Il ordonne une frappe sur la base syrienne de Shayrat, accusée d'avoir coordonnée une attaque chimique qui a tué 86 civils à Khan Cheikhoun, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Plus tôt dans la journée, le Conseil de sécurité de l'ONU a une nouvelle fois échoué à adopter une résolution condamnant le régime de Bachar Al-Assad. "Il est dans l'intérêt vital de la sécurité nationale des Etats-Unis de prévenir et dissuader la propagation et l'usage d'armes chimiques mortelles", justifie le président américain lors d'une allocution télévisée.
Cette frappe coïncide avec un durcissement de la politique de Donald Trump vis-à-vis de la Corée du Nord. Un porte-avion américain est déployé dans le Pacifique, mi-avril, après de nouveaux tirs de missiles balistiques par Pyongyang. "La Corée du Nord cherche des ennuis. Si la Chine décidait d'aider, ce serait formidable. Sinon, nous résoudrons le problème sans elle !", avertit Donald Trump sur son compte Twitter personnel, mardi 11 avril. Le régime communiste assure, lui, être prêt à la "guerre".
Autant de menaces qui inquiètent la communauté internationale, tant Donald Trump et Kim Jong-un semblent imprévisibles. "Mis en difficulté en interne, Trump essaye de se relancer à l'international, analyse Pascal Dayez-Burgeon, chercheur au CNRS et spécialiste des Corées. Mais il n'est pas certain qu'il puisse gérer une crise au Proche-Orient et en Asie." Le président américain se contente pour l'instant de montrer les muscles. "Il faut juste espérer que ça ne soit que des rodomontades", souffle le chercheur.
Jour 95 : un énième conflit d'intérêts éclabousse la présidence
Les opposants de Donald Trump se sont souvent inquiétés des risques de conflits d'intérêts si le milliardaire s'installait à la Maison Blanche. Ils tirent une nouvelle fois la sonnette d'alarme, lundi 24 avril, indique Politico (en anglais). En cause, un message faisant la promotion de l'hôtel de luxe du milliardaire à Mar-A-Lago en Floride, posté sur les sites internet des ambassades des Etats-Unis au Royaume-Uni et en Albanie. Donald Trump a fait de la résidence sa "Maison Blanche d'hiver", y organisant plusieurs rencontres officielles avec ses homologues. Mais sa compagnie continue de tirer des bénéfices de l'établissement.
La publicité disparaît rapidement des sites de l'administration, remplacée par un message d'excuse. "L'intention de l'article était d'informer le public au sujet du lieu où le président accueille les dirigeants mondiaux, explique Share America (en anglais), organisme lié au département d'Etat et auteur de la page. Nous regrettons toute mauvaise interprétation."
Ce n'est que la dernière polémique concernant des soupçons de conflits d'intérêts à la Maison Blanche. Les critiques de Donald Trump contre Nordstrom, une chaîne de magasin qui a décidé de ne plus distribuer la ligne de sa fille Ivanka, avait déjà hérissé ses opposants en janvier. Quelques jours plus tard, une des plus proches conseillères du président a appelé à acheter des vêtements de cette même marque lors d'une interview télévisée.
Jour 100 : Trump décroche le titre de président le plus impopulaire
Au centième jour de sa présidence, le bilan de Donald Trump est peu reluisant. Dans un communiqué (en anglais) pompeusement titré "Les 100 jours d'accomplissements historiques du président Trump", la Maison Blanche affirme pourtant qu'il a "fait passer plus de lois que tous les chefs de l'Etat depuis Truman" et qu'il a "plus accompli que tous les présidents depuis Franklin Roosevelt". En réalité, Donald Trump n'a réalisé que 10 des 38 mesures qu'il avait promises de mettre en place durant cette période, corrige le Chicago Tribune (en anglais). La plupart ont détricoté les lois mises en place par Barack Obama.
Donald Trump a, en revanche, bien réussi une première historique : 53% des Américains ont une vision négative de son action, selon un sondage pour le Washington Post (en anglais) publié samedi 22 avril. Seuls 42% des Américains se disent satisfaits de leur président après trois mois, précise le quotidien. Du jamais-vu si peu de temps après l'arrivée d'un nouveau locataire à la Maison Blanche.
Donald Trump est en outre passé à un cheveu de fêter son 100e jour de présidence avec un "shutdown", une fermeture de toutes les administrations fédérales, faute d'un accord sur le budget au Congrès. Un compromis a finalement été trouvé, vendredi 28 avril. Le Congrès a, en outre, voté un délai supplémentaire pour s'accorder sur les détails du texte, d'ici au 5 mai. La menace du "shutdown" planera toutefois lors du prochain vote sur le budget, en octobre, rappelle la BBC (en anglais). La suite de son mandat promet donc d'être aussi mouvementée que ses cent premiers jours à la tête des Etats-Unis.
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