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Présidentielle américaine : les pressions de Donald Trump sur un élu de Géorgie sont "incroyablement graves"

Corrompre un fonctionnaire américain est un crime fédéral, explique l'historien Thomas Snégaroff qui s'interroge sur les motivations profondes de Donald Trump qui ne reconnaît toujours pas sa défaite.

Article rédigé par Thomas Snégaroff
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Donald Trump, le 31 décembre 2020. (ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP)

Les pressions de Donald Trump sur un élu de l'État de Géorgie sont "incroyablement graves", souligne l'historien Thomas Snégaroff, spécialiste des États-Unis, lundi 4 janvier sur franceinfo. Le président américain a demandé samedi à l'élu républicain chargé des élections en Géorgie de "trouver" les bulletins de vote nécessaires pour annuler sa défaite dans cet État. "Il n'y a pas de mal à dire que vous avez recalculé", a notamment déclaré Donald Trump au secrétaire d'État de la Géorgie, selon un enregistrement de la discussion réalisé à son insu et rendu public par le Washington Post. "C'est un crime fédéral que de faire pression, de corrompre un fonctionnaire américain", rappelle Thomas Snégaroff, qui s'interroge : "Pourquoi veut-il à ce point rester au pouvoir ?"

franceinfo : Donald Trump a-t-il encore franchi un cap, selon vous ?

Thomas Snégaroff : Oui, Donald Trump qui évoque une infraction légale de la part du secrétaire d'État de la Géorgie [Donald Trump réaffirme notamment que des fraudes ont été commises de la part du camp démocrate : "Vous savez ce qu'ils ont fait et vous n'en parlez pas. C'est un délit, c'est un gros risque pour vous"] en commet une lui-même, parce que c'est un crime fédéral que de faire pression, de corrompre un fonctionnaire américain. En réalité, c'est celui qui accuse qui est le véritable auteur du crime ici. C'est effectivement quelque chose d'incroyablement grave qu'on voit là et qui pose en permanence la même question : pourquoi ? Pourquoi veut-il à ce point rester au pouvoir ? Est-ce que c'est uniquement parce qu'il aime le pouvoir ? Ou est-ce que c'est parce qu'il craint qu'en n'étant plus pouvoir, il puisse y avoir des poursuites à son encontre, à l'encontre de ses enfants, à l'encontre de ses proches ? C'est en tout cas des questions qui se posent aujourd'hui et qui se posent à la démocratie américaine.

La diffusion de ce coup de fil intervient alors que le Congrès doit enregistrer formellement le vote des grands électeurs en faveur de Joe Biden (306 contre 232) mercredi…

Après-demain, effectivement, il y a ce qu'on appelle la "certification". Et là, vous avez une centaine de républicains à la Chambre des représentants et 11 sénateurs républicains qui ne vont pas certifier les résultats. Ça ne veut pas dire que les résultats ne seront pas certifiés parce que, en réalité, il y a une majorité de républicains et l'ensemble des démocrates qui vont les certifier. Mais c'est quand même pour dire qu'au bout du processus, après tout ce qu'on a vu, tout ce qu'on a entendu, tous les recomptes, tous les recours judiciaires, vous avez encore 11 sénateurs qui vont refuser d'accorder la victoire à Joe Biden, ce qui en dit long sur l'état de la démocratie américaine, sur l'état du parti républicain et sur l'état de la présidence Biden qui va venir, parce que le président Biden aura face à lui des sénateurs qui n'accepteront même pas le fait qu'il soit président.

Au final, Donald Trump n'est pas vraiment tout seul dans son "bunker" à refuser sa défaite ? On voit qu'il a toujours des soutiens...

Effectivement, l'idée du bunker renvoie à l'image d'un homme isolé, enfermé. Or, là, il a derrière lui 20% à 25% des Américains qui pensent que Biden a été élu par la fraude. Il est enfermé dans sa réalité avec des gens qui le suivent et qui le croient. Et cela va continuer : parmi les prochaines étapes, il y a donc la certification des résultats, après-demain. Et puis, le 20 janvier, où monte de plus en plus la rumeur que non seulement Trump n'ira pas à l'inauguration, et ce serait une première dans l'histoire, mais qu'il profitera également de ce jour-là pour annoncer sa propre candidature à la présidentielle de 2024 ! On voit que le feuilleton va s'étirer peut-être encore des semaines et des semaines, voire des années.

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