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Présidentielle américaine : poussée de fièvre autour de la santé de Clinton et de Trump

Article rédigé par Mathieu Dehlinger
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Les candidats à la Maison Blanche Hillary Clinton et Donald Trump, respectivement à Reno et Fredericksburg (Etats-Unis), les 25 et 20 août 2016. (AFP)

Depuis plusieurs semaines, les soutiens de Donald Trump remettent en question l'état de santé d'Hillary Clinton, qui serait inapte à occuper le bureau ovale. En réalité, aucun des deux candidats n'est vraiment transparent sur le sujet.

Faites le test. "Allez sur internet, tapez 'Hillary Clinton maladie' et regardez les vidéos." Le conseil ne vient pas d'un illustre inconnu, mais de l'ancien maire de New York, Rudy Giuliani, devenu l'un des principaux supporters de Donald Trump outre-Atlantique. En perte de vitesse dans les sondages depuis plusieurs semaines, le candidat républicain à la Maison Blanche et ses soutiens ont fait de l'état de santé de sa rivale un argument de campagne. "Elle n'a pas l'endurance mentale et physique" pour s'installer dans le bureau ovale, assure le milliardaire.

A quoi font-ils référence ? Il suffit de faire un petit tour sur Google pour le comprendre. Parmi les premiers résultats de la recherche suggérée par Rudy Giuliani apparaît une vidéo intitulée "La vérité à propos du comportement bizarre d'Hillary". La séquence est l'œuvre de Paul Joseph Watson, rédacteur pour InfoWars. Le même site complotiste qui, à coup de T-shirts, propose de mettre "Hillary Clinton en prison jusqu'à la fin des temps".

Une vidéo complotiste sur la santé d'Hillary Clinton, diffusée le 4 août 2016 sur YouTube, a déjà été vue plus de 3,6 millions de fois. (YOUTUBE)

Pendant six minutes, la voix off disserte sur les "convulsions" dont aurait été victime la candidate démocrate, analyse ses expressions faciales, dénonce ses réactions "exagérées", surveille la moindre quinte de toux et pointe d'"étranges" lésions sur sa langue. Paul Joseph Watson affirme avoir demandé l'avis de psychologues et de psychiatres. Des sources bien entendu anonymes. L'autisme et la syphilis figurent parmi les diagnostics évoqués. D'autres sites complotistes évoquent la maladie de Parkinson.

Clinton dénonce la "paranoïa" de Trump

Deux séquences seraient particulièrement inquiétantes. Sur la première, tournée dans une boutique de Washington DC en juin, l'ancienne secrétaire d'Etat fait d'étranges mouvements de la tête. Les séquelles d'une commotion cérébrale de 2012 ? Une crise d'épilepsie ? Un AVC ? Rien de tout cela, à en croire Lisa Lerer, présente en face d'elle à ce moment-là. "Peut-être avide d'échapper à nos questions ou juste surprise par notre volume, Hillary Clinton a répondu avec un mouvement exagéré", explique la journaliste d'Associated Press. "Je n'avais jamais été partie prenante d'une théorie du complot", s'amuse-t-elle.

La seconde séquence date de février, mais elle a refait surface ces dernières semaines. Sur les images, Hillary Clinton monte des escaliers, visiblement épaulée par deux hommes à ses côtés. Le site conservateur Drudge Report a évoqué à sa une des "photos chocs", l'animateur de Fox News Sean Hannity y a consacré une partie de son émission, analyses de spécialistes à l'appui. Est-elle incapable de marcher ? En réalité, au moment du cliché, l'ancienne secrétaire d'Etat venait tout juste de glisser sur les marches, explique CNN (en anglais).

Hillary Clinton, en campagne à Charleston (Caroline du Sud, Etats-Unis), le 24 février 2016. (JONATHAN ERNST / REUTERS)

Tout cela n'est que pure "hallucination", "paranoïa", réplique Hillary Clinton. Officiellement, la candidate va très bien. "Madame Clinton est une femme de 67 ans en bonne santé dont les problèmes médicaux actuels incluent une hypothyroïdie et des allergies saisonnières aux pollens", écrit son médecin dans un certificat (PDF en anglais) publié en juillet 2015. Le document de deux pages se veut précis : le lecteur peut connaître la pression artérielle de la démocrate, son rythme cardiaque, sa température au moment de l'examen et même son niveau de triglycérides. Conclusion : "Elle est en excellente forme physique et capable d'exercer la fonction de présidente des Etats-Unis."

Deux candidats pas très transparents

Toujours prompt à s'autocongratuler, Donald Trump est moins disert quand il s'agit de parler de sa santé, hormis de ses habitudes alimentaires, lui le passionné de fast-food. Le milliardaire a aussi dévoilé un certificat de son médecin, moins détaillé que celui de sa rivale. "Sa force physique et son endurance sont extraordinaires, salue le praticien. S'il est élu, je peux le dire sans équivoque, Monsieur Trump sera, parmi les individus élus à la Maison Blanche, celui dont la santé est la meilleure." Interrogé par NBC (en anglais), le Dr. Harold Bornstein explique avoir écrit sa lettre en quelques minutes seulement. Léger ? Suffisant pour permettre à Hillary Clinton de contre-attaquer : sur son site, elle dissèque le document et remet clairement en cause sa fiabilité.

Mais la polémique désormais lancée, elle risque bien de se retourner contre les deux rivaux seniors : l'une âgée de 68 ans, l'autre de 70 ans. "Aucun des candidats n'a publié la quantité d'informations médicales que les électeurs méritent, dénonce USA Today, le principal quotidien américain, dans un éditorial (en anglais). Il n'y a pas matière à rire. Ce que les candidats à la présidentielle ont révélé de leur santé par le passé a parfois été faux, et presque toujours sporadique." Le New York Times (en anglais) fait le même constat et rappelle qu'en 2008, le républicain John McCain avait permis à des journalistes d'étudier plus de 1 100 pages de dossiers médicaux. Hillary Clinton et Donald Trump sont aujourd'hui loin d'une telle transparence.

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