Motivations du tireur, failles de sécurité... Les questions qui se posent après la tentative d'assassinat visant Donald Trump

Article rédigé par Marie-Violette Bernard
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6 min
Donald Trump est évacué par les services secrets américains après la tentative d'assassinat qui l'a visé, le 13 juillet 2024, à Butler, en Pennsylvanie (Etats-Unis). (REBECCA DROKE / AFP)
De nombreuses zones d'ombres demeurent après l'attaque contre le candidat républicain, samedi. Franceinfo fait le point sur les interrogations auxquelles l'enquête devra répondre.

Plus de questions que de réponses. Après la tentative d'assassinat qui a visé Donald Trump lors d'un meeting en Pennsylvanie, samedi 13 juillet, l'enquête commence seulement à livrer les premiers éléments sur les circonstances de l'attaque. Des zones d'ombre persistent, notamment sur les motivations du tireur, mais aussi sur les potentielles failles de sécurité qui lui ont permis d'accéder à un toit avec une vue directe sur l'ex-président. Franceinfo revient sur les interrogations qui demeurent.

Le tireur était-il politisé ?

Le FBI a révélé, dès dimanche, plusieurs éléments sur le profil du tireur. Thomas Matthew Crooks, 20 ans, était originaire de Bethel Park, une ville de Pennsylvanie située à une soixantaine de kilomètres du lieu du meeting de Donald Trump. "Pour l'instant, le suspect ne semble pas affilié à une idéologie, mais il est encore tôt dans l'enquête", a précisé Kevin Rojek, agent spécial du FBI en charge de l'enquête, lors d'un briefing cité par le Washington Post.

Des doutes demeurent sur les orientations politiques de Thomas Matthew Crooks. Il était enregistré comme électeur républicain dans une base de données électorales (PDF) de Pennsylvanie, et aurait voté pour la première fois en novembre prochain. Mais un donateur appelé Thomas Crooks et domicilié à la même adresse avait effectué, en 2021, un don de 15 dollars au Progressive Turnout Project, un mouvement proche des démocrates ayant pour mission d'encourager les électeurs à aller voter. Interrogé par l'agence de presse Reuters, un de ses anciens camarades de lycée a affirmé qu'il n'avait jamais montré d'intérêt particulier pour la politique.

Quelles étaient ses motivations ?

Le mobile de Thomas Matthew Crooks reste inconnu. L'enquête n'a, pour l'heure, pas permis de retrouver de manifeste ou de déclaration dans lequel il expliquerait son geste. Aucun lien n'a été établi entre le suspect et des groupes terroristes. "A ce stade, les informations dont nous disposons indiquent qu'il a agi seul", a précisé Kevin Rojek. Le FBI dit explorer la piste d'un "potentiel acte de terrorisme intérieur". Des engins explosifs "rudimentaires" ont été retrouvés dans la voiture et au domicile du tireur, et ont tous été neutralisés, a-t-il ajouté.

Selon le New York Times, Thomas Matthew Crooks n'avait aucun compte sur les réseaux sociaux les plus couramment utilisés. La plateforme Discord a affirmé avoir découvert un compte lié au tireur, mais qui était rarement utilisé. "Nous n'avons trouvé aucune preuve qu'il a été utilisé pour préparer cette attaque ou [par le tireur] pour évoquer ses opinions politiques", a déclaré l'entreprise.

La police est déployée près du domicile de Thomas Matthew Crooks, à Bethel Park (Pennsylvanie, Etats-Unis), le 14 juillet 2024. (REBECCA DROKE / AFP)

Selon le Washington Post, le FBI tente désormais d'accéder au contenu du téléphone du tireur, envoyé à son siège de Quantico (Viriginie), tout en examinant ses activités en ligne. L'agence Associated Press ajoute que Thomas Matthew Crooks portait au moment de sa mort un t-shirt avec le logo de la chaîne Youtube Demolition Ranch, qui poste des vidéos d'utilisation de diverses armes à feu et d'engins explosifs, mais l'enquête n'a pas encore confirmé que le jeune homme consultait ces vidéos.

Le vingtenaire, qui travaillait dans un centre de soins, n'avait aucun trouble mental connu et n'avait jamais fait l'objet d'investigations ou de surveillance de la part des forces de l'ordre fédérales, détaille le New York Times. Ses collègues et anciens camarades de classe affirment n'avoir vu "aucun signe" annonciateur de son acte.

Comment a-t-il préparé cette attaque ?

Thomas Matthew Crooks a ouvert le feu sur le président avec fusil semi-automatique AR-15, a précisé le FBI. L'arme et son propriétaire ont été identifiés rapidement via une recherche du Bureau fédéral en charge de l'alcool, du tabac et des armes à feu (ATF). Le fusil avait été "acheté légalement" par le père du tireur, a ajouté le FBI.

Les enquêteurs ignoraient encore dimanche si Thomas Matthew Crooks avait emprunté l'arme à son père ou s'il l'avait prise sans son autorisation. L'agence a toutefois déclaré que la famille du tireur collaborait avec les autorités. Dans une brève déclaration à CNN, son père, Matthew Crooks, a dit qu'il tentait de comprendre "ce qui se passait" mais qu'il "attendait de parler à la police" avant de s'exprimer au sujet de son fils.

Selon les témoignages d'anciens camarades de lycée recueilli par la chaîne américaine ABC News, Thomas Matthew Crooks avait été écarté de l'équipe de tir de son lycée il y a plusieurs années, car trop "mauvais tireur". Un club de tir situé près de Pittsburgh, le Clairton Sportsmen's Club, a cependant confirmé dimanche qu'il comptait le vingtenaire parmi ses membres, depuis au moins un an.

Comment a-t-il pu avoir une vue dégagée sur Donald Trump ?

L'une des questions les plus critiques est celle d'une éventuelle faille dans la protection de Donald Trump. Thomas Matthew Crooks a mené son attaque depuis le toit d'un immeuble situé à moins de 150 mètres de la tribune où le candidat républicain s'exprimait. Très vite, des responsables se sont interrogés sur le périmètre de sécurité mis en place autour du meeting, qui a permis au tireur de s'approcher si près de l'événement, avec une ligne de vue dégagée sur le candidat républicain. "Un des éléments de base de la sécurisation d'un site (...) est d'éliminer toute ligne de mire vers l'endroit où se trouvera la personne protégée", a souligné Andrew McCabe, ancien directeur adjoint du FBI, interrogé par CNN.

Le Secret service, chargé d'assurer la protection des présidents américains (anciens et actuel) et d'autres personnalités, a rapidement déclaré que le bâtiment où se trouvait Thomas Matthew Crooks ne relevait pas de son périmètre, mais de celui de la police locale. Celle-ci a été informée par plusieurs participants au meeting de la présence d'un homme au comportement étrange, à proximité du site.

Le shérif du comté de Butler a déclaré à la chaîne ABC News que le suspect avait rapidement été repéré par un de ses agents, alors qu'il se trouvait sur le toit d'un bâtiment proche du meeting. L'homme a aperçu le policier et l'a mis en joue avec son arme, le forçant à battre en retraite. L'agent a aussitôt averti le reste des forces de l'ordre, mais le tireur a ouvert le feu en direction du meeting de Donald Trump.

Des agents du Secret service interviennent après que Donald Trump a été visé par des tirs lors d'un meeting à Butler, en Pennsylvanie (Etats-Unis), le 13 juillet 2024. (REBECCA DROKE / AFP)

Un porte-parole du Secret service, Anthony Guglielmi, a répondu dimanche à des rumeurs affirmant que son agence avait refusé des moyens de sécurité supplémentaires demandés par Donald Trump pour sécuriser ce meeting. "C'est totalement faux. En réalité, nous avons ajouté des moyens, technologies et capacités de protection face au rythme plus intense de déplacements durant la campagne", a-t-il écrit sur le réseau social X.

Dans un second message, il a réfuté les déclarations d'une journaliste assurant que le Secret service avait réduit la protection de Donald Trump pour assurer la sécurité d'un meeting de la Première dame, Jill Biden. Selon CNN, Kevin Rojek a également déclaré qu'il "n'y a jamais eu de demande supplémentaire de sécurité refusée par le FBI".

Plusieurs élus républicains au Congrès ont déjà annoncé une commission d'enquête sur les circonstances de la tentative d'assassinat. Joe Biden, lui, a ordonné une "enquête indépendante", qui devra notamment mettre au jour d'éventuelles défaillances du Secret service.

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