Affaire Benalla : trois questions sur le rôle d'"observateur" occupé par le collaborateur d'Emmanuel Macron lors du 1er-Mai
Le collaborateur d'Emmanuel Macron a été identifié alors qu'il frappait un manifestant lors d'un rassemblement organisé place de la Contrescarpe, le 1er mai.
Comment Alexandre Benalla a-t-il pu frapper impunément un manifestant, place de la Contrescarpe, à Paris, lors des manifestations du 1er-Mai ? C'est l'une des questions auxquelles le jeune homme de 26 ans, chargé de mission auprès du chef de cabinet de la présidence au moment des faits, devra répondre vendredi 20 juillet lors de sa garde à vue.
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Filmé alors qu'il portait un casque à visière de police et entouré de CRS, Alexandre Benalla n'était pourtant pas autorisé à intervenir directement lors de l'opération de maintien de l'ordre. Il avait, en effet, demandé à être présent en tant que simple "observateur". Pour mieux comprendre l'affaire qui plonge l'Elysée dans la tourmente, franceinfo se penche sur le rôle des ces fameux observateurs des opérations des forces de l'ordre.
Alexandre Benalla pouvait-il se tenir aux côtés des policiers ?
Cité par Le Monde, le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron, Patrick Strzoda, a expliqué qu'Alexandre Benalla lui avait demandé "deux jours" avant les rassemblements du 1er-Mai l'autorisation "de participer à une intervention auprès de la préfecture de police pour voir comment se gérait une grande manifestation". Une autorisation qui lui a été accordée, à condition que ce chargé de mission n'y assiste qu'en tant que simple observateur.
Le quotidien du soir ajoute, vendredi, que la demande d’intégrer Alexandre Benalla à la manifestation n'a pas été adressée au ministère de l'Intérieur, mais a été faite "directement par l’Elysée auprès de la DOPC, la Direction de l’ordre public et de la circulation, qui gère les manifestations". Celle-ci relève du champ d'action de la préfecture de police.
Contactée par franceinfo, la préfecture confirme accueillir occasionnellement "des personnes extérieures à [ses] services lors d'opérations de maintien de l'ordre, pour de courtes durées". Parmi ces profanes se trouvent, en général, "des journalistes, des chercheurs, ou des magistrats en formation". Mais un syndicaliste policier assure au Monde qu'il est également possible que des employés de l'Elysée ou d'un ministère assistent à une manifestation, même si cette situation est rare.
Il est, en revanche, assez rare que ce soit un membre de ministère ou de l’Elysée, même si ce n’est pas une hérésie.
Patrice Ribeiro, du syndicat de police Synergie-officiersau Monde
Son équipement était-il réglementaire ?
Au moment où il est filmé en train de porter des coups à un manifestant, Alexandre Benalla porte un casque à visière transparente orné d'un écusson. Sur d'autres vidéos tournées auparavant, on peut le voir porter un brassard de police et tenir un talkie-walkie.
Concernant le casque, rien d'inhabituel. "On leur donne nos casques, nous n'en avons pas de spéciaux pour les observateurs", indique la préfecture à franceinfo. Le brassard marqué police et le talkie-walkie ne sont en revanche pas prévus pour de simples observateurs. "Ce qui me surprend, c’est qu’il n’ait pas été équipé de matériel de protection civile, qu’il ait porté un casque police, un brassard police et même une radio, a indiqué sur Europe 1, Denis Jacob, secrétaire général du syndicat de police Alternatives CFDT. Même si ça été autorisé, ça reste pour moi un délit. Se faire passer pour un policier, c’est un délit."
Le responsable syndical n'est vraisemblablement pas le seul à être de cet avis. Le parquet de Paris a confié à la brigade de répression de la délinquance contre la personne une enquête préliminaire, notamment sur le chef d'"usurpation de signes réservés à l'autorité publique".
Avait-il le droit d'intervenir directement lors d'opérations ?
La préfecture est formelle : "Les observateurs ne sont qu'observateurs, c'est tout. Ils observent". Les autorités concèdent simplement qu'en fonction des "circonstances" d'une manifestation, les personnalités extérieures peuvent se tenir au plus près des forces de l'ordre lors d'une intervention.
Interrogé jeudi par franceinfo, le secrétaire général de l’Unsa-police, Philippe Capon, confirme que ces observateurs n'ont, en aucune manière, l'autorisation de participer directement aux opérations de maintien de l'ordre. Alexandre Benalla, lui, a empoigné et frappé un manifestant.
Il frappe violemment et utilise des moyens d’interventions qui sont normalement complètement à proscrire dans ce type de situation.
Philippe Capon, secrétaire général de l'Unsa-policeà franceinfo
"Cela fait penser aux temps où les gros bras intervenaient sur des manifs et en général pas de façon très régulière. On nous dit la police est violente, mais là, la police a fait son travail et la situation dégénère à cause d’une personne qui n’est pas fonctionnaire de police", martèle le responsable syndical.
David Michaux, du syndicat UNSA-CRS, explique la passivité des CRS qui entouraient Alexandre Benalla lorsque celui-ci frappait un manifestant par la confusion autour du statut du conseiller d'Emmanuel Macron. Selon lui, les forces de l'ordre venues en renfort place de la Contrescarpe "ont vu des civils et ils ont cru que c’était la BAC qui procédait à des interpellations", indique-t-il au Monde.
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