L'élection présidentielle peut-elle vraiment être reportée à cause de l'affaire Fillon ?
Si François Fillon devait renoncer à la présidentielle en raison de l'affaire Penelope Fillon, certains constitutionnalistes estiment que le scrutin pourrait être reporté.
Et si l'affaire Penelope Fillon entraînait un report de l'élection présidentielle ? La question peut paraître farfelue, et pourtant, elle est très clairement évoquée par le constitutionnaliste Dominique Rousseau. "Si Fillon est empêché, le 10 mars, le Conseil constitutionnel peut décider le report de l'élection présidentielle", écrit-il dans un tweet posté mercredi 1er février.
Si Fillon empêché, le 10 mars, le CC peut décider le report de l'élection présidentielle; elle aurait alors lieu 35 jours après décision CC.
— Rousseau Dominique (@RousseauDomini5) 1 février 2017
Qu'en est-il réellement ? D'un point de vue purement formel, cette possibilité de reporter l'élection présidentielle est effectivement prévue par l'article 7, alinéa 6, de la Constitution.
Si, dans les sept jours précédant la date limite du dépôt des présentations de candidatures, une des personnes ayant, moins de trente jours avant cette date, annoncé publiquement sa décision d'être candidate décède ou se trouve empêchée, le Conseil constitutionnel peut décider de reporter l'élection.
article 7, alinéa 6, de la Constitution
Les constitutionnalistes sont toutefois partagés sur l'interprétation du terme "empêchement". "Juridiquement, l'empêchement est un obstacle à se présenter. A mon sens, il pourrait s'agir d'une mise en examen, ou bien même du scandale provoqué par cette affaire", estime Dominique Rousseau.
Un "empêchement" qui doit intervenir entre le 10 et le 17 mars
Interrogé par Libération, son confrère Pascal Jan va dans le même sens : "Mon interprétation, c’est qu’à partir du moment où il y a eu un processus démocratique de désignation d’un candidat, qu’il s’agisse ou non d’une primaire, si celui-ci estime qu’il ne peut pas participer à la compétition électorale, on se retrouve dans une situation où il est objectivement empêché, même si c’est dans un contexte politique et non judiciaire."
Un avis que ne partage pas leur confrère Jean-Philippe Derosier : "Un empêchement, ce pourrait par exemple être une condamnation à une peine d'inéligibilité", juge-t-il, interrogé par franceinfo.
Un renoncement, par exemple en raison d'une mise en examen, ne pourrait, selon moi, pas constituer un empêchement, car il s'agit d'une décision personnelle.
Jean-Philippe Derosier, constitutionnalisteà franceinfo
S'il était saisi, le Conseil constitutionnel aurait donc à définir l'empêchement, ce qu'il n'a jusqu'à présent jamais eu à faire.
Reste la question du délai évoqué dans l'article 7 de la Constitution. Pour que les Sages statuent sur un report du scrutin, l'empêchement doit intervenir "dans les sept jours précédant la date limite du dépôt des présentations de candidatures". Pour l'élection à venir, les 500 signatures doivent être déposées avant le 17 mars à 18 heures. L'empêchement devrait donc avoir lieu entre le 10 et le 17 mars. Une condition qui relativise fortement la probabilité d'un report de l'élection présidentielle : si François Fillon renonce à sa candidature avant le 10 mars, la question ne se posera même pas.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.