"SMS agressifs, propos insultants, attaques personnelles" : "La Voix du Nord" dénonce "le quotidien difficile" de ses journalistes à Hénin-Beaumont
Le journal régional publie, samedi, une tribune pour raconter les agissements de la mairie FN à l'égard de ses correspondants locaux.
A force, les journalistes de La Voix du Nord s'y sont habitués. Depuis l'arrivée de l'élu Front national Steeve Briois à la mairie d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) en 2014, leurs conditions de travail se sont considérablement dégradées.
Dans son édition du samedi 13 mai, le quotidien local a choisi de raconter dans ses colonnes le dernier épisode en date. Il remonte à une semaine, dimanche 7 mai. Ce jour-là, à la mi-journée, le journal rapporte sur son site internet des choses vues et entendues dans les rues de la ville à l'occasion du second tour de l'élection présidentielle. Il constate par exemple qu’il y avait "moitié moins de journalistes pour couvrir le vote de Marine Le Pen au second tour qu’au premier. Un pur et simple constat sans commentaire."
Mais ces quelques lignes vont déclencher une vague de propos violents et insultants de la part d'un cadre du Front national. Arrive un premier mail, directement adressé à l’auteure de l’article. Il est signé Bruno Bilde, adjoint frontiste à la mairie : "Si les journalistes de La Voix du Nord faisaient leur métier (ce qui est beaucoup leur demandé) [sic] (…) ils pourraient expliquer que nous avons exigés [sic] un pool pour les médias étrangers contrairement au premier tour." L'intéressée répond spontanément : "Pourquoi ? Il fallait aussi une accréditation pour rester sur le trottoir ? Allons…" Et Bruno Bilde surenchérit "d’un élégant" : "Sur le trottoir ? Vous parlez en experte !"
Un doigt d’honneur adressé à une journaliste
Aujourd'hui, la journaliste explique être "un peu sonnée, et même étonnée" : "Je me suis dit que là, il allait vraiment loin dans l’insulte." Et rappelle qu'il "faut avoir la santé et les nerfs bien accrochés pour travailler à La Voix du Nord Hénin".
Ce n'est en effet pas la première fois que le Front national prend à partie la rédaction locale du journal. Pêle-mêle, le quotidien résume les insultes, les intimidations, les coups de pression... Comme ce "doigt d’honneur adressé à une autre collègue le jour de la Sainte-Barbe 2015".
Quand tu vas à un conseil municipal, tu n’y vas pas de gaieté de cœur, tu sais que tu vas être pris à partie.
Un journalisteLa Voix du Nord
"Une entrave au droit d’informer"
Jean-Michel Bretonnier, rédacteur en chef de La Voix du Nord, rappelle que "les pratiques du maire Front national et de ses adjoints proches constituent une entrave au droit d’informer. Le refus systématique de répondre à nos questions et l’avalanche de droits de réponse veulent nous priver d’informations et nous dissuader de publier celles auxquelles nous accédons néanmoins. Les SMS agressifs, les propos insultants, les attaques personnelles ont pour objectif de tenter d’humilier nos journalistes devant la population et de les intimider." Avant de conclure ainsi : "Avec courage et sang-froid, au nom de leur métier et de leur journal, grâce au soutien d’Héninois, ils tiennent bon. Je veux leur rendre hommage."
Les relations entre la municipalité frontiste et le journal se sont tendues encore un peu plus au moment des élections régionales en 2015. Le quotidien avait ouvertement appelé à faire barrage au FN. Cette année-là, dans son édition du 30 novembre, il titrait en une : "Pourquoi une victoire du FN nous inquiète." Sept mots, une phrase, qui avaient créé une vive polémique entre le journal et la candidate d'alors, Marine Le Pen.
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