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Pourquoi Hollande et Valls ont décidé de se passer de Montebourg (et ce qu'ils risquent)

Après les vives critiques émises dimanche par le ministre de l'Economie sur la politique menée par l'exécutif, le Premier ministre et le président de la République ont décidé d'envoyer un message fort aux parlementaires.

Article rédigé par Bastien Hugues
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Arnaud Montebourg, ancien ministre de l'Economie, quitte le palais de l'Elysée, le 28 avril 2014. (MAXPPP)

Action, réaction. Moins de vingt-quatre heures après les vives critiques du ministre de l'Economie, Arnaud Montebourg, à l'égard de la politique menée par l'exécutif, le Premier ministre, Manuel Valls, a présenté la démission de son gouvernement, lundi 25 août.

Les mots de la présidence de la République sont clairs : conforté à son poste, Manuel Valls doit, d'ici à mardi, "constituer une équipe en cohérence avec les orientations que le chef de l'Etat a lui-même définies pour notre pays". Traduction : tous ceux qui sont en désaccord avec le cap fixé sont priés de faire leurs valises. 

La mise en application de la "doctrine Valls"

La décision de l'exécutif constitue un acte d'autorité majeur. Après des mois de bisbilles gouvernementales sous Jean-Marc Ayrault, le nouveau Premier ministre avait lui-même prévenu à son arrivée à Matignon qu'il ne tolèrerait aucun désaccord public, évoquant "un logiciel anti-couac". Trois mois plus tard, Manuel Valls transforme sa parole en acte : selon son entourage, c'est d'ailleurs lui qui serait à l'origine du grand chamboule-tout annoncé lundi matin.

Montebourg souhaitait une réorientation de la politique fixée par Hollande et Valls ? Ces derniers lui adressent un message de fond, à lui comme à l'ensemble des contestataires : il en est hors de question. "Cela a le mérite de clarifier incontestablement la politique choisie par Hollande et Valls", observe le politologue Laurent Bouvet. L'indiscipline du ministre était d'autant plus insupportable que le chef de l'Etat avait lui-même réaffirmé sa ligne, quatre jours plus tôt, dans un long entretien accordé au journal Le Monde

Une décision à double tranchant

Cette décision risque toutefois de poser de nouveaux problèmes. Après s'être séparés des écologistes, François Hollande et Manuel Valls vont désormais se priver de plusieurs représentants de l'aile gauche du PS : Arnaud Montebourg, Benoît Hamon, Aurélie Filippetti, et peut-être Christiane Taubira.

Fini le gouvernement de synthèse, où différentes sensibilités devaient se compléter : désormais, le gouvernement sera profondément social-démocrate, ou ne sera pas. Encore devra-t-il avoir pour cela une majorité au Parlement. "La marge de manœuvre est étroite, mais elle existe", estime le politologue Laurent Bouvet. Ces derniers mois, le camp des députés frondeurs a fait des émules. Les élus socialistes sceptiques sur les effets de la politique d'austérité menée par François Hollande semblent, au fil des mois, de plus en plus nombreux.

La "grenade Montebourg" dégoupillée

Jusqu'à présent dépourvus de véritables poids lourds, ces frondeurs vont désormais pouvoir compter sur les ministres démissionnés. Dès les premières tensions avec son turbulent ministre, François Hollande avait répété aux journalistes qu'il valait mieux "un Montebourg dedans qu'un Montebourg dehors". Désormais, il devra composer avec un Montebourg dehors.

"Arnaud Montebourg savait bien qu'il risquait de perdre son poste. Peut-être a-t-il d'ailleurs fait cette sortie dans l'espoir de quitter le gouvernement, et ainsi pouvoir reprendre en main la gauche du PS, estime le politologue Gérard Grunberg. Reste à savoir si les frondeurs voudront de lui comme ténor."

"Montebourg a décidé de jouer sa carte personnelle. Plus l'échéance de 2017 va approcher, plus il va lâcher ses coups contre Hollande, redoute déjà un poids lourd du groupe PS à l'Assemblée, joint par francetv info. Désormais, c'est une grenade qu'absolument personne ne sera en mesure de contrôler."

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