Pourquoi l'ultimatum des écolos ne fait pas peur à Hollande
Samedi, Pascal Durand a donné "six jours" au président pour s'engager sur la transition énergétique. Mais au-delà du coup de gueule sur la fiscalité du diesel, la marge de manœuvre des dirigeants d'EELV est réduite.
Quel crédit accorder au coup de semonce des écologistes ? Samedi 14 septembre, le secrétaire national d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Pascal Durand, a donné six jours à François Hollande et au gouvernement pour s'engager concrètement dans la transition énergétique.
Après les ratés gouvernementaux sur la fiscalité écologique, puis sur les taxes concernant le diesel, les Verts s'estiment menés en bateau. "On nous ment. Il n'y aura pas de transition énergétique dans ce pays si la loi n'est pas soumise au Parlement fin 2014", a pesté Pascal Durand. Mais au-delà du coup de gueule, la marge de manœuvre des écolos est réduite. Francetv info vous explique pourquoi.
Parce qu'ils ont déjà fait le coup
La dernière fois, c'était au début de l'été. Delphine Batho venait d'être éjectée du gouvernement pour avoir critiqué le "mauvais budget" de son ministère de l'Ecologie. Une décision qui avait suscité la colère des écologistes. Car même si Delphine Batho n'était pas l'une des leurs, les positions qu'elle défendait au gouvernement allaient clairement dans leur sens.
Quelques heures et une réunion de crise plus tard, la menace de sortir du gouvernement n'avait pas été mise à exécution. "Nous attendons du président et du Premier ministre des engagements clairs et des actes pour que l'écologie soit définitivement prise en compte dès le budget 2014", s'était finalement contenté de conclure Pascal Durand, confirmant que les ministres Cécile Duflot et Pascal Canfin ne démissionneraient pas.
Avant cet épisode, le traité budgétaire européen et le projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes avaient déjà semé la zizanie dans les rapports entre les Verts et le reste de la majorité. Plus les ultimatums se multiplient sans être suivis d'effet, moins ils sont pris au sérieux.
Parce qu'il n'a d'ultimatum que le nom
Pascal Durand a donné "six jours" à François Hollande pour se ressaisir. Une échéance qui mène au vendredi 20 septembre, jour où la deuxième conférence environnementale doit être ouverte par le président de la République, que personne n'imagine venir les mains vides, ultimatum ou non.
Dimanche soir, sur TF1, le chef de l'Etat a donné un avant-goût de ce qu'il pourrait annoncer lors de cette conférence. Ferme sur la question du diesel ("ce n'est pas rendre service à l'écologie (...) que de la réduire à des impôts"), il a promis "très prochainement" un crédit d'impôt sur la rénovation thermique des bâtiments, autre sujet cher aux écologistes.
"Notre ultimatum a fait pschiit", a reconnu dans Sud-Ouest le député Noël Mamère, tenant d'une ligne dure face au gouvernement. Mais à EELV, le ton a changé depuis vendredi. "Je n'ai posé aucun ultimatum" au gouvernement, a déclaré Pascal Durand sur France Inter. Le leader a vu des "signaux" dans l'intervention présidentielle. "Pourquoi voulez-vous que j'imagine qu'il ne pose rien alors que lui-même a encore dit hier soir que l'écologie était une opportunité ?"
Parce qu'un divorce PS-Verts est inenvisageable à la veille des municipales
En pleine pré-campagne pour les élections municipales, un divorce entre les deux principales composantes de la majorité serait une catastrophe pour la gauche. Certes, le PS conserverait à lui seul une (courte) majorité absolue à l'Assemblée nationale, mais l'exécutif se trouverait très affaibli si les ministres écolos claquaient la porte du gouvernement. De quoi inciter François Hollande et Jean-Marc Ayrault à trouver les mots pour retenir leurs "amis".
Mais chez les Verts aussi, l'idée d'un départ est loin de faire l'unanimité. Difficile, par exemple, d'imaginer Cécile Duflot démissionner du gouvernement juste après l'adoption à l'Assemblée de sa loi sur le logement, qu'elle s'apprête à défendre au Sénat. De nombreux élus écologistes savent, en outre, qu'ils doivent leur poste aux socialistes. Ces derniers ont en effet accepté en 2012 de ne leur opposer personne dans leur circonsciption, et ce malgré le score très faible d'Eva Joly à la présidentielle.
Le scrutin municipal s'annonce particulièrement rude pour la majorité, sur fond de défiance de l'opinion et de montée du Front national. Si la fracture venait à s'agrandir, le PS pourrait rechigner à accueillir sur ses listes les candidats EELV au second tour. Et les militants écolos s'abstenir de voter pour le candidat PS. Un scénario perdant-perdant que personne, ni d'un côté ni de l'autre, n'envisage sérieusement.
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