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La victoire de Hamon est-elle vraiment une bonne nouvelle pour Macron ?

C'est Benoît Hamon qui représentera le Parti socialiste et ses alliés à la présidentielle. Une candidature qui laisse a priori la voie libre au leader d'En marche ! pour draguer les électeurs de centre-gauche.

Article rédigé par Simon Gourmellet
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
Emmanuel Macron, le 24 janvier 2017 à Beyrouth (Liban).  (MAXPPP)

Manuel Valls était présenté comme son principal adversaire à gauche. Mais la victoire de Benoît Hamon à la primaire de la gauche, dimanche 29 janvier, change la donne. Cette victoire surprise est-elle du pain béni pour Emmanuel Macron ? Franceinfo pèse le pour et le contre.

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Oui car il dispose d'un boulevard au centre

Avec ce succès de Benoît Hamon, c'est un représentant de l'aile gauche du Parti socialiste qui va être investi. Un changement de cap pour le PS qui laisse un créneau libre au centre-gauche et qu'Emmanuel Macron ne va pas manquer d'incarner. "Un espace nouveau s'ouvre aujourd'hui", se réjouissait, quelques minutes après la proclamation des résultats, Gérard Collomb, soutien de l'ancien ministre de l'Economie. Désormais, Macron se retrouve confronté à deux lignes "dures" : celle de François Fillon à droite et celle de Benoît Hamon à gauche. Entre les deux, et à part une hypothétique candidature de François Bayrou, c'est un boulevard qui s'offre au leader d'En marche !

Autre avantage pour Macron : là où Benoît Hamon s'est fait élire sur son revenu universel et François Fillon sur son message de rigueur, Emmanuel Macron est sur des mesures moins clivantes et pour l'instant plus vagues (baisse des charges, hausse du pouvoir d'achat...) et chasse aussi bien sur les terres de la droite et de la gauche. En décembre dernier, au lendemain de la primaire de la droite, Emmanuel Macron s'était déjà engouffré dans la brèche : "Les progressistes de droite et du centre, tous ceux qui ont voté pour Nathalie Kosciusko-Morizet ou Alain Juppé, ne peuvent pas se retrouver dans le programme de François Fillon." Un constat qui peut désormais être dressé au sein du PS au lendemain de la primaire.

Oui car la gauche est divisée

Emmanuel Macron fait face à une gauche très désunie. La très brève poignée de main sur le perron de Solférino en dit long sur les relations et l'ambiance qui règne entre le camp de Benoît Hamon et celui de Manuel Valls. Et même si son entourage évoque un "bug technique", la manière dont le vainqueur a coupé la parole au vaincu n'a pas arrangé les choses. Il faut dire que la primaire a exposé au grand jour les fractures qui divisent le PS, déjà partagé entre réformateurs et frondeurs. Comment apaiser les vallsistes quand leur leader présentait Benoît Hamon, au soir du premier tour, comme le candidat de "la défaite assurée" aux "promesses irréalisables et infinançables", à l'opposé de la "gauche crédible".

Et au-delà du simple Parti socialiste, avec la présence de Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot, la gauche se concurrence elle-même. Ces trois candidats font campagne sur les mêmes créneaux (écologie, réforme des institutions, abrogation de la loi El-Khomri) et risquent donc de se marcher sur les pieds, faisant ainsi les affaires d'Emmanuel Macron. Benoît Hamon se rend visiblement compte du problème, puisqu'il a annoncé, dès son discours de victoire, sa volonté d’ouvrir le dialogue avec Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot, mais les deux hommes excluent pour l'heure tout ralliement.

Oui car il va engranger de nouveaux ralliements

La fuite des vallsistes est déjà entamée. Plutôt que de soutenir un candidat qu'ils ont combattu durant cette primaire, la tentation Macron est trop forte. A l’image du député PS du Cantal Alain Calmette, qui a annoncé dès dimanche soir rejoindre le candidat d’En marche ! : 

Même choix pour Marc Goua, le député-maire de Trélazé (Maine-et-Loire). D'autres ont déjà prévenu qu'ils ne soutiendraient pas Benoît Hamon, "un faux frère" comme l'appelle Dominique Baert, député du Nord. Interrogé sur BFMTV dimanche soir, le maire d'Evry Francis Chouat n'a pas exclu lui non plus un ralliement à l'ex-ministre de l'Economie, tout comme la députée PS de Savoie Bernadette Laclais et le député de Gironde Gilles Savary.

Ce dernier a justement préparé un texte qui sera soumis mardi 31 janvier aux députés "réformateurs" du PS. "C'est un droit de retrait de la campagne de Hamon, une sorte d'objection de conscience", explique-t-il. Selon le vallsiste Philippe Doucet, la moitié de la cinquantaine de députés réformateurs pourraient "être tentés par l'hypothèse Macron".

Non car il devient le seul héritier de Hollande

Si un boulevard se dégage pour lui, Emmanuel Macron devient également une cible idéale. Avec l'élimination de Manuel Valls, il perd son paratonnerre et est désormais le seul à incarner le quinquennat raté de François Hollande. A lui, l'ancien ministre de l'Economie et secrétaire général adjoint de l'Elysée, d'encaisser les attaques venues de la gauche, de Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon notamment, mais aussi, forcément, de la droite.

François Fillon a déjà commencé à l'attaquer sur ce terrain dans son interview au JDD : "Toute l'équipe gouvernementale de Hollande est en train de le rejoindre. Macron, c'est le sortant, c'est l'héritier, c'est Hollande. C'est pour ça que ce sera très difficile pour lui." Et le candidat de la droite d'en rajouter une couche lors de son meeting : "Macron, c’est le sortant, c’est le bilan de Hollande. Macron, c’est le prototype des élites."

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