Pièces à conviction. Faut-il un pilote dans l’avion ?
Il y a un an, le 24 mars 2015, Andreas Lubitz, un jeune copilote allemand de la Germanwings, précipite volontairement son avion sur les Alpes françaises. Il n’y a aucun survivant. Très vite, on découvre qu’il souffre d’une grave dépression qu’il avait cachée à son employeur. L’enquête de "Pièces à conviction" révèle de lourdes failles dans le suivi psychologique des pilotes. Et puisque l’erreur humaine est à l’origine de la moitié des catastrophes aériennes, des chercheurs font déjà voler des avions sans pilote.
Le 24 mars 2015, le jeune copilote allemand Andreas Lubitz précipitait l’avion de la Germanwings sur les contreforts des Alpes françaises. Les 144 passagers et les 6 membres d’équipage mouraient sur le coup.
Pour "Pièces à conviction", Marianne Kerfriden et Geoffrey Livolsi ont reconstitué les dernières minutes du vol. A 10h30, le commandant de bord fait une pause et quitte le cockpit. Andreas Lubitz se retrouve seul aux commandes et à moins d’une heure de l’arrivée, il amorce la descente. A 10h30, il précipite l’appareil contre le flanc de la montagne. Il n’y a aucun survivant. Dans son rapport final sur l’accident, le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) vient de confirmer le scénario du crash volontaire.
Les failles du suivi psychologique des pilotes
Andreas Lubitz souffrait d’une grave dépression, mais il était pourtant aux commandes d’un avion de ligne. L’enquête de "Pièces à conviction" lève le voile sur les failles du suivi psychologique des pilotes. Pour avoir le droit de voler, ils doivent chaque année passer une visite médicale. Ils sont convoqués par des praticiens agréés en médecine aéronautique pour une demi-journée de consultation.
Au programme : contrôle ophtalmologique, électrocardiogramme, prise de sang et contrôle auditif et examen psychologique… qui se résume à un simple questionnaire ! Facile, dans ces conditions, de cacher un état dépressif. Et Andreas Lubitz avait réussi à passer entre les mailles du filet. Les mois précédant le crash, le jeune copilote avait consulté 41 médecins pour des problèmes de dépression, en cachant la situation à ses employeurs comme à son entourage. Le crash de la Germanwings a révélé qu’il était urgent de renforcer le suivi médical des pilotes de ligne, d’autant que le trafic aéronautique ne cesse d’augmenter.
Le "pay to fly", quand il faut payer pour piloter
Faute d’expérience suffisante, de jeunes pilotes ne trouvent pas d’emploi. En effet, de nombreuses compagnies internationales n’embauchent pas de pilotes novices et fixent un seuil minimum d’heures de vol déjà accomplies pour sélectionner leurs recrues. Ainsi, pour réaliser leur rêve, de jeunes diplômés en arrivent à payer pour piloter : c’est le "pay to fly" (payer pour voler), une pratique interdite en France.
Grâce au "pay to fly", certaines compagnies aériennes basées en Europe de l’Est ou en Asie ont trouvé un nouveau poste d’économies en monnayant des heures de vol : des agences d’intérim proposent d’acquérir de l’expérience en vol avec de vraies compagnies, la plupart du temps à bas coût, et de jeunes pilotes paient des milliers d’euros pour obtenir le précieux sésame des 500 heures de vol qui leur permettra peut-être d’intégrer une grande compagnie.
Cette pratique est pourtant dangereuse : le rythme effréné des voyages et les conditions de travail très éprouvantes peuvent pousser les pilotes vers le burn-out, mettant les passagers en danger. Le syndicat des pilotes européens souhaite faire interdire le "pay to fly", qui précarise le marché de l’emploi des pilotes, menace la sécurité aérienne et fragilise l’homme. Or c’est l’erreur humaine qui, dans la moitié des cas, est à l’origine des accidents aériens.
Faut-il encore un pilote dans l’avion ?
Aujourd’hui combien de temps un pilote est-il réellement aux commandes d’un avion ? Sur un vol Paris/New-York de 7 heures, un commandant de bord ne pilote en réalité qu’une demi-heure. L’informatique et les automatismes ont révolutionné les postes de pilotage. Sur le vol long courrier d’un Airbus 330, les procédures sont trop complexes et la commande manuelle peut s’avérer inhumaine. En prenant le relais, la machine soulage le pilote, améliore la sécurité et le confort des passagers.
Peut-on envisager qu’un jour, des avions sans pilote transportent des passagers ? Si l’idée du tout-automatique fait son chemin et que les études et tests se multiplient, il reste de nombreux blocages – techniques, psychologiques et juridiques… – avant qu’elle ne s’impose.
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