"Quand on rappait dans la rue d'Aubagne, les murs étaient déjà fissurés": le groupe marseillais IAM porte un regard critique sur l'évolution de sa ville
Les rappeurs emblématiques de Marseille sortent leur dixième album. Sur franceinfo, Shurik'n et Akhenaton reviennent sur l'évolution de leur ville.
IAM sort vendredi 22 novembre son dixième album, Yasuke, du nom d'un esclave africain du XVIe siècle devenu samouraï au Japon. Dixième album pour les trente ans d'existence du groupe emmené par Akhenaton, Shurik'n, Kheops, Imhotep et Kephren, qui préfère l'appellation "pionniers" du rap français à "parrains" ou "grands anciens" expliquent-ils sur franceinfo.
Ceux qui ont commencé doucement à rapper en 1984 dans les rues de Marseille restent des emblèmes de la ville. A l'instar de ses habitants, ils ont été profondément marqués par les effondrements des immeubles de la rue d'Aubagne il y a un peu plus d'un an et par la façon dont la ville a été gérée ces dernières années. "Je pense que chez les Marseillais, il y a beaucoup de résignation dans la manière dont a évolué la ville, explique Akhenaton. On vit dans une ville fantastique où il y a des tas de choses à faire. On a cette impression que c'est un territoire qui n'est pas réellement exploité. Il y a des gens qui sont en marge. Les côtés de la ville ne sont pas recollés, le centre et le Nord et une partie de l'Est n'a rien à voir avec les quartiers Sud. "On est une ville scindée en deux," poursuit Shurik'n.
"Cette ville a besoin de plus de culture, de plus de communication entre les gens"
"Ce quartier, c'est le quartier où ma famille s'est installée quand elle est arrivée d'Italie, explique Akhenaton. J'ai une douleur particulière parce que ma mère est des Carmes et le père de mon père était du Panier, donc du centre-ville. Ce qu'on dit souvent c'est quand on rappait dans ces rues, dans la rue d'Aubagne et les rues adjacentes, la rue du Musée, tout Noailles, les murs étaient déjà fissurés," explique Akhenaton. "En 1990, c'était déjà comme ça," affirme Shurik'n.
Akhenaton poursuit : "Cette ville a besoin de plus de culture, de plus de communication entre les gens, plus d'éducation, plus de transports, et d'un certain enthousiasme. Un enthousiasme qui était là dans les années 1990, mais bizarrement quand le désert culturel et le manque d'éducation viennent s'installer, les cœurs se vident et ils se remplissent de n'importe quoi".
Malgré ce constat, loin d'eux l'idée de s'engager en politique. "Notre engagement, on l'a toujours voulu artistique, assure Shurik'n. A un moment donné, chacun son métier et on connaît bien le nôtre. Et si tout le monde connaissait bien le sien, on ne serait pas en train de parler de ce genre de choses-là maintenant. Oui, on a des choses à dire mais de là à franchir le cap non. On connaît notre place, on sait où on peut être efficaces et je pense qu'on est à la bonne place."
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