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Diner avec le diable

A première vue, rien n'est plus inconséquent que de reprocher à autrui de "diner avec le diable", vieille expression allemande signifiant qu'on se rapproche un peu trop près de quelqu'un de très peu recommandable.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Franceinfo (Franceinfo)

D'abord dans la vie de tous les jours, on côtoie par la
force des choses tout plein de personnages à la morale douteuse. Ensuite bien
sur, il y a des professions qui obligent à diner avec le diable. Par exemple
les diplomates, les avocats, les médecins et les journalistes.

La tache quasi quotidienne des diplomates est d'arrondir les
angles ou désamorcer les conflits avec des ennemis potentiels avec lesquels ils
mangent des petits fours. Les avocats gagnent souvent leur vie en défendant l'indéfendable.
Ce n'est pas pour des prunes qu'on avait baptisé feu Maitre Vergès l'"avocat du diable". Ses principaux clients étaient les pires
tortionnaires mondiaux et les plus méprisables des terroristes mais dans un
état de droit chacun doit être défendu. Idem pour les médecins. Tout le monde
doit avoir accès aux soins et un médecin digne de ce nom ne vérifie pas les qualités
morales de son patient avant d'engager une chimio.

Et puis, il y a les journalistes...Il y a l'interview
exclusive du dictateur syrien Assad obtenue pour Le Figaro par notre excellent confrère
Georges Malbrunot. Oui, il est allé à Damas diner avec le diable. Il a posé des
questions et enregistré les réponses d'un dictateur de la pire espèce. Il
s'agit là d'un travail d'information et non de connivence. Quand le socialiste
Bruno Le Roux lui reproche d'avoir "offert une tribune à quelqu'un qui
gaze son peuple", il fait mine de n'avoir rien compris. Le journalisme
s'honore en donnant aussi la parole aux méchants. Tout dépend bien sur des
conditions de réalisation et de publication de l'interview. Mais, pardon, notre
métier ne consiste pas seulement à interroger Mandela, Mère Térésa ou l'abbé
Pierre. Ce serait trop beau et trop simple.

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