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Le Polar Pod : un navire vertical révolutionnaire pour étudier l'océan Austral

L'océan n'a jamais été aussi important face au défi du réchauffement climatique. Le Polar Pod est une plateforme océanographique habitée, conçue et organisée par Jean-Louis Étienne. Ce navire va permettre d'étudier l'océan Austral qui encercle l'Antarctique. 

Article rédigé par Catherine Pottier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Jean-Louis Etienne va lancer la construction de son projet Polar Pod.  (POLAR POD)

La Journée mondiale des océans, mercredi prochain 8 juin, va permettre de continuer d'étudier des océans que l'on connaît de mieux en mieux, mais pas encore suffisamment, c'est pourquoi l'explorateur et scientifique Jean-Louis Étienne lance la construction de son projet Polar Pod, une plateforme océanographique habitée, un navire vertical révolutionnaire qui va permettre d'étudier l'océan Austral. Un défi scientifique et technologique. 

A lui seul, l'océan absorbe 93% des excès de chaleur ! C'est aussi un puits de carbone et un fournisseur d'oxygène qui permet une respiration sur deux sur la planète. "On peut lui dire merci !", dit Jean-Louis Étienne qui a parcouru les mers pendant des années. Cet ancien tourneur-fraiseur, devenu docteur en médecine et interne en chirurgie, a consacré sa vie à la découverte de la planète.

En tant que médecin, il a été équipier à bord du Pen Duick VI d'Eric Tabarly, lors de sa course autour du monde en 1977/78. Il a aussi participé à de nombreuses expéditions dans l'Himalaya, au Groenland ou en Patagonie, jusqu'à devenir le premier homme à atteindre le pôle nord en solitaire, en 1986. Trois ans plus tard, il récidive en Antarctique (pôle sud) et réalise la Transantarctica.

"Le Polar Pod est un culbuto des mers."

Jean-Louis Étienne, médecin et explorateur

à franceinfo

L'océan Austral est méconnu car il est loin tout simplement, et rares sont les missions scientifiques qui s'aventurent dans ces zones hostiles, balayées par les vents des 40e rugissants et des 50e hurlants, comme les marins ont baptisé cet océan de tempête. "C'est un océan ouvert qui circule autour de l'Antarctique", explique Jean-Louis Étienne. Un océan immense dont la superficie atteint 20,33 millions de km2.

Photographie gagnante du concours photo des Nations Unies à l'occasion de la Journée mondiale des océans. Catégorie : Océans, vie et subsistance. (RENEE CAPOZZOLA)

Si l'océan Austral est encore méconnu, il est néanmoins un acteur majeur du climat et de la biodiversité marine, d'où la nécessité de l'explorer plus attentivement afin de récolter des mesures in situ.

Jean-Louis Étienne a donc imaginé un navire vertical de 100 mètres de haut avec une partie immergée de 80 mètres. La construction de ce navire hors norme va être lancée prochainement car l'explorateur a enfin rassemblé l'argent nécessaire pour mener à bien cette mission qui va durer trois ans. Il aura fallu 10 ans pour que cet engin digne d'un roman de Jules Verne voit enfin le jour !

Un navire vertical pour explorer l'océan Austral

Le Polar Pod est une sorte de laboratoire flottant, à mi-chemin entre un bateau et une plateforme scientifique. Au cours de ses trois ans de mission, le navire va dériver sur l'océan Austral, porté par le courant circumpolaire. "L'intérêt de la verticalité, c'est la stabilité", explique Jean-Louis Étienne. Le Polar Pod bénéficie d'un tirant d'eau (partie immergée) de 80 mètres. La partie habitable sera donc loin de la surface, et va bénéficier d'eaux plus stables qui ne seront pas impactées par le vent.

A la surface, le vent et la mer se rencontrent ce qui forment des vagues monstrueuses dans cette région du globe. En étant sous l'eau, ces perturbations seront beaucoup moins ressenties. Le navire sera bardé de capteurs et fera deux fois le tour du monde au cours de ces trois ans de mission qui débuteront fin 2023.

"L'ocean Austral est immense" explique Jean-Louis Étienne, 22.000 kilomètres de circonférence", c'est le principal puits de carbone de la planète car ses eaux sont très froides, entre 0 et 8 degrés en été ! On sait que le CO2, le gaz carbonique que l'on émet en excès, se dissout prioritairement dans les eaux froides. On estime que l'océan Austral absorbe, à lui seul, la moitié de l'ensemble du CO2 absorbé par les océans.

La construction de ce navire vertical habité de 100 mètres de haut va commencer. Départ prévu en décembre 2023 pour trois années d'expédition.  (POLAR POD)


" Les vagues brassent l'air, emprisonnent les bulles d'air, ce qui permet de dissoudre le CO2, poursuit l'explorateur. Le Polar Pod devrait donc permettre d'obtenir des données très précises sur les échanges entre l'atmosphère et l'océan. Des données fondamentales pour comprendre l'évolution du climat", insiste Jean-Louis Étienne. L'objectif de cette expédition coordonnée par le CNRS, en partenariat avec l'IFREMER et le CNES (centre national d'études spatiales), sera également de recueillir des données sur la biodiversité grâce à l'acoustique notamment.

Le Polar Pod est silencieux, il glisse sur l'eau, mais il sera équipé d'hydrophones, des micros très puissants installés sous l'eau, qui permettront de dresser un inventaire acoustique de la faune présente dans cette zone reculée du monde. Une sorte de carte sonore de l'océan qui permettra d'identifier les différentes espèces.

Trois ans d'expédition et deux tours du monde

Le Polar Pod, qui va donc dériver dans des zones très ventées, fonctionnera grâce à 6 éoliennes de 3 kilowattheures chacune et 2 packs de batterie de 50 kilowattheures pour les besoins domestiques et scientifiques. L'équipage bénéficiera aussi d'un groupe électrogène d'urgence, mais l'objectif premier est le "zéro émission, affirme Jean-Louis, le moteur c'est le courant, et l'électricité c'est le vent", dit-il.

Au total, 80 scientifiques devraient se relayer à bord du Polar Pod. Les relèves d'équipage se feront tous les deux mois en pleine mer, grâce à un bateau baptisé "Persévérance". L'équipage sera composé de 3 marins et de 4 scientifiques. L'expédition doit partir de Port Elizabeth en Afrique du Sud, en décembre 2023.
Le retour est prévu en décembre 2026.

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