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C'est dans ma tête. Micro-crédit : une aide matérielle et psychologique

À partir de lundi, l’ADIE (Association pour le droit à l’initiative économique) organise une "semaine du micro-crédit". Ces micro-crédits peuvent-ils être vraiment une aide efficace pour des personnes en difficulté ? La psychanalyste Claude Halmos pense qu'ils jouent un rôle essentiel. 

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Une femme vend le lait de sa vache achetée à l'aide d'un microcrédit, au Bangladesh, en janvier 2014. (REUTERS / RAFIQUR RAHMAN)

Je crois qu’ils peuvent jouer un rôle très important. Les crédits accordés par l’ADIE, par exemple, sont en moyenne de 3.800 euros. Et ils s’adressent à des personnes qui voudraient créer une micro-entreprise (par exemple devenir coiffeur à domicile), mais qui n’ont pas accès aux crédits bancaires parce qu’elles vivent des revenus sociaux, sont même parfois illettrées etc…C’est donc une aide matérielle.

Sur le plan psychologique, c’est encore plus important

La personne qui veut créer une micro-entreprise doit en effet constituer un dossier. Et, pour l’aider à le constituer, des membres de l’association (qui sont, pour l’essentiel, des bénévoles) vont la recevoir et l’écouter. C’est à dire lui montrer, simplement par cet accueil, qu’elle est quelqu’un. Une personne valable qui mérite qu’on la prenne au sérieux.

Rien que cela, c’est énorme. Parce que, dans notre société, tout se passe toujours comme si, quand on n’a plus ni travail ni argent, on n’était plus personne. Et les chômeurs disent d’ailleurs, à quel point ils vivent mal le fait que Pôle Emploi ne leur envoie jamais de courriers personnalisés mais seulement des circulaires anonymes.
En fait l’accueil de l’association est un premier pas pour que la personne sans emploi puisse commencer à modifier l’image- négative- qu’elle a d’elle-même.

Et ensuite, si son dossier est accepté, on accompagne cette personne 

Et cela aussi est essentiel. Parce que cela signifie qu’elle n’est plus seule, qu’elle a enfin trouvé un interlocuteur et, qui plus est, un interlocuteur bienveillant. Or on sait, là aussi, à quel point l’isolement, la solitude sont dangereux pour les chômeurs. Ils se coupent des autres parce qu’ils ont honte : d’abord de leur situation et puis, peu à peu, d’eux-mêmes. Et cette honte les conduit souvent à la dépression. Et puis savoir que son projet a une valeur et qu’un organisme "officiel" va l’aider à le réaliser, redonne à la personne, avec l’estime d’elle-même, l’énergie pour faire avancer ce projet.

Ces projets aboutissent-ils vraiment ?

L’ADIE affirme qu’elle donne, chaque année, à beaucoup de gens la possibilité de "se fabriquer" un nouveau travail. Et ce n’est pas étonnant parce qu’en montrant à ces gens qu’ils sont suffisamment dignes de confiance pour qu’elle leur prête de l’argent, elle leur donne la force de surmonter leurs difficultés et de prendre un nouveau départ.

Le micro-crédit est une main tendue, par la société, à une personne en détresse. Et il est, de ce fait, un outil de reconstruction psychologique en même temps qu’un outil de reconstruction sociale.

Et cet outil devrait faire réfléchir nos dirigeants parce qu’il prouve, qu’à condition d’avoir la volonté de le faire et une réflexion juste, on peut, sans dépenser des fortunes, remettre socialement sur pied beaucoup de gens.

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