Un ouvrier noir comparé à un singe à Saint-Nazaire
Oizir Abdallah est charpentier soudeur. Il est Réunionnais, il est embauché à 22 ans chez STX. Et après quatre années de moqueries racistes, de blagues douteuses, il découvre un jour une photo : un singe sur le dos, les pattes écartées. Une photo qui va le faire sortir de ses gonds et le pousser à la démission.
Oizir claque donc la porte de la STX. Un an et demi après les faits, le 18 décembre dernier, le Conseil des prud'hommes de Saint-Nazaire lui donne raison. Sa démission est requalifiée en "prise d'acte" : l'équivalent d'un licenciement nul. Résultat : 24.000 euros de dommages et intérêts.
Récemment, une affaire similaire était révélée à la SNCF : un SMS raciste et des chants néonazis diffusés dans le local des agents de la sûreté ferroviaire de Montpellier. Par ailleurs, cette affiche représentant un singe évoque forcément l'affaire Taubira, la Garde de sceaux comparée elle aussi à un singe.
La victime était notamment défendue par le Défenseur des droits. Le Défenseur des droits, c'est l'organisme qui a remplacé la Halde. Il aide les victimes de discriminations. De discriminations au travail, notamment. Il peut saisir les tribunaux, aux côtés des victimes.
Selon Slimane Laoufi, juriste, responsable de l'emploi privé au Défenseur des droits, de plus en plus d'affaires comme celles-ci, de discrimination en raison de l'origine, sont signalées dans le monde du travail.
Mais où commence le harcèlement ? A partir de quand on considère qu'il ne s'agit plus de simple blague de mauvais goût mais de comportement raciste ? Il y a une nouveauté dans le jugement du Conseil des prud'hommes de Saint-Nazaire : un seul acte a suffi. Pour qu'il y ait harcèlement, ici harcèlement raciste, pas besoin qu'il s'étale dans le temps. En l'occurence, c'était l'affiche du singe avec le prénom de la victime.
Pour prouver ces faits devant les tribunaux, il faut rassembler tous les documents dont on dispose, les emails, les SMS que l'on peut faire constater par un huissier. Les attestations de la part des collègues sont utiles aussi. Des témoignages qui n'ont pas toujours valeur d'attestation au sens de la loi, mais qui ont quand même "une valeur indicative", comme l'ont écrit les conseillers prud'hommaux. Des témoignages qui ont pesé lourd dans la balance.
Pour signaler de tels actes, il faut exercer un "droit d'alerte" : en parler à ses délégués du personnel s'il y en a dans l'entreprise. On peut aussi alerter le médecin du travail et l'inspecteur du travail, et puis bien sûr contacter le Défenseur des droits. Il dispose de 450 délégués partout sur le territoire. La liste est sur le site. On peut aussi écrire au Défenseur des droits, 7 rue Saint-Florentin 75008 Paris. Ou encore téléphoner au 09 69 39 00 00. Et naturellement, c'est gratuit.
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