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C'était comment ? Le malheur des postiers

Les postiers étaient en grève jeudi 8 décembre. Ils se sont rassemblés devant le Sénat, à l'appel de leurs syndicats. Cadences, suppressions de postes, suicides. Nathalie Bourrus y était.

Article rédigé par franceinfo, Nathalie Bourrus
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un centre de tri du courrier à Montreuil. (MAXPPP)

C’était… "On est devenus des menteurs." Non, pas nous, les journalistes. Ça c’est impossible. Eux, les postiers !

Quand l’un d’eux m’a dit ça, j’ai cru avoir mal entendu. "Des menteurs ? Mais sur quoi ? Genre, vous nous dites qu’une lettre qu’on attend n’est pas là, alors qu’elle est là ?"

J’avoue, je ris sottement, en disant cela. Lui, non. "Oui, ce genre de chose peut arriver."

"Hein ? Mais quand même, ce n’est pas compliqué d’aller chercher la lettre !"

Je me revois… On l’a tous plus ou moins vécue cette scène, à poiroter dans la queue, devant le guichet, en ayant l’impression que, bon ben, ce n’était pas compliqué d’aller chercher cette lettre !

"On ne parle plus aux gens"

"En fait, poursuit le garçon, on n’est pas assez nombreux. Les consignes sont claires : on nous dit de faire ça et ça, dans tel timing… Si tu fonces, tu peux y arriver."

Moi : "Ben, faut foncer."

Lui : "Foncer, on peut, moi je n’ai que 30 ans, je peux… mais dans ce cas, on ne parle plus aux gens, on ne fait QUE foncer."

Moi : "A la fois, on n’est pas là pour papoter."

Son voisin me répond : "Je suis à la poste depuis 33 ans. Mes parents m’avaient inscrit au concours des PTT. Et puis, ça m’a plu ce boulot… C’est un boulot de contact, c’est ça, l’intérêt de la Poste, c’est ça qui est sympa à faire…"

"Panne d'informatique"

Je n’avais pas vu les choses sous cet angle. En fait, la Poste, c’est vraiment l’épicerie du coin, le café du commerce. "Et nous, on écoute les gens, on est là pour soutenir les gens seuls aussi." L’épicerie du coin… et un vrai cabinet de psy.

Un autre homme poursuit : "Moi, je suis facteur. J’ai exactement une minute trente pour délivrer une lettre chez les gens. Donc, le temps de monter les escaliers ou de prendre l’ascenseur, de sonner, d’attendre un peu que la personne ouvre… quand c’est un gosse, il va appeler ses parents… de sortir la lettre ou le colis, et de faire signer… ça peut, en effet, en me stressant à mort, prendre une minute trente. Mais je ne parle plus aux gens ! Je leur dit à peine bonjour. C’est triste !"

Un autre s’immisce dans la conversation : "Mais il y a pire ! C’est quand on met le panneau 'panne d’informatique'."

"Quel panneau ?"

"On met un panneau en faisant croire qu’il y a une panne d’ordinateur… mais c’est faux ! On ment aux clients, parce qu’on n’a pas le temps de s’occuper d’eux."

Les bras m’en tombent. La Poste… nos bons vieux PTT, café du commerce-épicerie et psy, nous mentent. Je me dis que pour en arriver là… mentir ouvertement, le dire, le révéler, l’assumer, et expliquer pourquoi… c’est qu’il faut être très très mal en point.

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