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C'était comment ? Ces Gabonaises en colère

Nouveau rassemblement de la diaspora gabonaise à Paris le mercredi 7 septembre près du siège des Républicains. Des Africaines en colère. C'était comment, Nathalie Bourrus ?

Article rédigé par Nathalie Bourrus
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'une des manifestantes Gabonaises qui a défilé dans les rues de Paris ce mercredi après-midi.  (THOMAS SAMSON / AFP)

C’était... quand les Africaines se révoltent. Cette Afrique noire que j’aime tant. Cette Afrique noire, blessée par des carnassiers sans vergogne au pouvoir. Cette Afrique noire, aussi folle que sage. Cette Afrique noire de femmes très énervées. Et celles que j’ai rencontrées ce matin à côté du siège des Républicains, étaient... comment dire ?... pas piqué des hannetons.

"Mais c’est dingue ! C’est toujours la même histoire ! Ils prennent le pouvoir et le garde 40 ans, 50 ans... Non mais vous vous rendez compte ?" Je regarde cette maman, qui vit en France depuis toujours. En fait non, je ne me rends pas compte... Je ne sais pas vous, mais 40 ou 50 ans à la tête d’un pays, j’ai du mal à imaginer. En France, au bout de 3-4 ans, on pète les plombs. On veut les mettre à la porte. Ne plus en entendre parler.

Je me dis : quelle patience, ces Africains... "Mais non, s’énerve la maman. Ce n’est pas de la patience, c’est de la bêtise ! Il ne faut plus accepter ça !"

À cote d’elle, une autre Gabonaise de la diaspora. "Vous vous rendez compte ? J’ai 45 ans, donc je n’ai connu que les Bongo au pouvoir. Et je devrais me dire que mes enfants et mes petits-enfants ne connaîtront que les Bongo au pouvoir ? C’est de la folie".

La stabilité dans le sang, ça s’appelle la tyrannie

Une manifestante
gabonaise à Paris

Je me remets à tenter de voir la scène. Et j’avoue qu’une fois encore, je n’arrive pas à imaginer ce pouvoir suprême qui passerait de main en main, dans le même clan familial... Comme des potes qui se repasseraient le même film, tous les samedis soir... Le truc qui tourne en boucle. Ou comme un hamster dans sa roue, sans fin.

Moi (un rien provocatrice) : "Et ça pourrait pas s’apparenter à de la stabilité ?"

L’une d’elle : "Le problème, c’est que la stabilité dans le sang, ça s’appelle la tyrannie. Au début oui, on pensait ça... En plus il y avait toutes les richesses dans notre pays... Mais là, c’est un désastre."

L’autre femme : "Où sont les écoles ? Où sont les dispensaires ? Où sont les routes ? Si tu voyais ça... Le Gabon sombre, alors qu’il avait tout. Mais vous savez, ça évolue en Afrique... La croissance a évolué... Sauf que les gens n’en voient pas la couleur. Il n’y a aucune redistribution. Je crois que ce mot est inconnu d'Ali Bongo".

Moi : "Et de Jean Ping [celui qui est censé avoir gagné la présidentielle], il est connu, ce mot ?"

On parle un peu plus bas. "Disons qu’il a le bénéfice du doute. On a besoin d’alternance"

Moi : "Mais il vient du sérail... Il a été ministre, il a présidé l'Assemblée générale des Nations unies..."

"Et l’OPEP... le pétrole donc, ajoute-t-elle. Mais on sait ! Il connaît la musique, il n’est pas forcement tout nickel... Mais il a fait tuer personne lui."

Ces femmes, le poing levé, très énervées, savent qu’elles sont une goutte d’eau. La goutte d’eau, qui veut se transformer en torrent. Pour empêcher le hamster de tourner dans sa roue... encore pendant 40 ans.

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