Troubles anormaux du voisinage : une loi pour limiter les conflits relatifs au bruit ou à l'odeur des élevages à la campagne
Protéger les agriculteurs et leurs activités des plaintes des riverains : voilà l'objectif de la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels, dont le vote définitif est à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale lundi 8 avril 2024, après une adoption du Sénat le 3 avril dernier.
En définissant la notion de "trouble anormal de voisinage", le texte espère limiter les conflits qui peuvent opposer les agriculteurs et leurs voisins, comme le cas de cette éleveuse de poules en Savoie, mise en demeure fin 2023 par une voisine gênée par le bruit de l'élevage de gallinacés.
En 2022, le cas d'un éleveur bovin de l'Oise, condamné à verser 100 000 euros à des riverains incommodés par le bruit et l'odeur des bêtes, avait fait réagir de nombreux agriculteurs, qui ont dénoncé un phénomène d'agribashing révélateur des fantasmes des urbains récemment installés à la campagne.
Le garde des Sceaux lui-même, au Salon de l'agriculture en 2023, avait promis une loi pour éviter ces conflits aux agriculteurs, déclarant que "si l’on n’aime pas la campagne, on reste en ville et si l’on va à la campagne, on s’adapte à la campagne qui préexiste".
Un phénomène difficile à quantifier
La proposition de loi définit, en fait, ce que n'est pas un trouble anormal du voisinage, sur la base de trois critères cumulatifs : l'activité doit être antérieure à l'arrivée des plaignants, se poursuivre dans les mêmes conditions et conforme à la législation.
Si les litiges entre agriculteurs et riverains hérissent la profession et font souvent couler beaucoup d'encre, ils restent difficiles à comptabiliser. Un rapport publié dans le cadre de la loi dite "Maurice", du nom de ce coq de l'île d'Oléron jugé trop bruyant, compte entre 400 et 500 cas litigieux, tout en admettant que tous ne sont pas liés à la ruralité.
Le texte s'attaque-t-il à un faux problème ? C'est ce qu'argumentent certains députés, syndicats et chercheurs, qui craignent que cette définition du trouble anormal de voisinage ne permette à l'agriculture intensive de continuer de s'étendre et, avec elle, ses pollutions.
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