Hongrie : l'Europe garante des droits fondamentaux
Agressions antisémites, discrimination contre les roms, chasse aux sans abris, expulsés des lieux publics, définition restrictive de la famille, les signaux d'alerte se multiplient en Hongrie . La société civile exprime son inquiétude face aux ratonnades et autres défilés néonazis, et organise à son tour des rassemblements impressionnants pour dénoncer l'extrême-droite.
Le pouvoir, lui, fait bonne figure et continue à défendre sa ligne de conduite. Le premier ministre Viktor Orban s'affiche au Congrès juif mondial (qui, ironie du sort, tient sa 14ème assemblée générale à Budapest), y prône la "tolérance zéro" contre l'antisémitisme, qu'il qualifie d'"inacceptable et intolérable". Mais ne fait pas allusion aux récents incidents, et ne se démarque pas clairement du parti d'extrême droite Jobbik.
L'Europe estime qu'il est de son devoir d'intervenir
L'Europe, celle des 27 comme des 47, dit une nouvelle fois son inquiétude. Notamment concernant la dernière modification de la Constitution, la quatrième en l'espace de 15 mois. Après la liberté de la presse et la justice, c'est la Cour constitutionnelle qui est visée, que le pouvoir tente de museler. Inadmissible pour l'Union européenne et le Conseil de l'Europe, qui menacent d'engager des poursuites et des sanctions, pour violation des valeurs fondamentales que la Hongrie s'est pourtant engagée à respecter en devenant membre des deux organisations.
Viviane Reding, vice-présidente de la Commission européenne, affiche sa fermeté . Ses services juridiques mènent actuellement une étude détaillée des dernières modifications constitutionnelles pour voir s'il est opportun de lancer des procédures en infraction. La Commission de Venise, chargée des questions constitutionnelles au Conseil de l'Europe, doit publier un avis mi-juin. Les députés européens et les parlementaires des 47 se prononceront eux aussi le mois prochain, sur la situation des droits fondamentaux et sur la necessité d'ouvrir une "procédure de suivi", ce qui serait une première à l'égard d'un Etat membre de l'Union.
Division gauche-droite, le PPE soutient Orban
Au Parti populaire européen, principal groupe au Parlement européen, le malaise est perceptible. Il accueille le Fidesz, le parti de Viktor Orban ; le Premier ministre a même été vice-président du parti. Il s'est rendu en catimini à Strasbourg lors de la dernière session d'avril pour se défendre de violer les règles communes et recueillir le soutien de ses collègues. L'eurodéputé Jean-Marie Cavada a préféré s'abstenir. Et afficher au contraire son soutien à Viviane Reding. Il ne mâche pas ses mots contre celui qu'il qualifie de "petit tyranneau de banlieue ".
Les socialistes comme les Verts dénoncent la complaisance du PPE à l'égard de Viktor Orban et l'invitent à choisir clairement son camp. Le chef de file des Libéraux, l'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, prône l'utilisation de l'article 7 du traité de l'Union, qui permet de "suspendre un Etat de ses droits de vote en cas de violation grave des valeurs européennes ". Procédure qualifiée de "bombe atomique" par Viviane Reding. Il y a deux ans, l'Europe y avait renoncé et avait fini par réussir laborieusement à faire modifier les lois les moins conformes, sur les médias, la liberté de la presse et le système judiciaire.
Viktor Orban rejette les critiques, estimant que ses réformes constitutionnelles sont conformes aux "valeurs européennes". Il se dit prêt à faire quelques concessions. Et menace, en cas de sanctions financières, de les répercuter sur ses citoyens par la mise en place d'un impôt spécifique. "Car nous ne sommes pas prêts à augmenter notre déficit public à cause d'une amende ou d'un dédommagement international ", explique le Premier ministre, qui considère le modèle économique européen comme "pas tenable".
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