Au Kenya, la production d'avocats aiguise l'appétit des gangs criminels
Le Kenya est devenu en 2021 le premier exportateur d’avocats du continent, dépassant l’Afrique du Sud. Revers de la médaille, ce fruit est de plus en plus la proie à des vols organisés de ce qu’on appelle désormais le “pétrole vert”.
C’est depuis le centre du pays, une région vallonnée où les pluies sont plus abondantes qu’ailleurs, que la majorité des avocats quittent le Kenya, direction l’Europe principalement. À Kandara, comme dans d’autres exploitations du pays, les producteurs d’avocats sont désemparés car depuis plusieurs mois, des gangs s’organisent pour récolter et voler les avocats durant la nuit.
“Dimanche dernier, je me suis levé à l’aube. Je suis venu ici et j’ai constaté qu’ils avaient coupé les barbelés. Ils sont entrés dans la plantation et ont volé les fruits de cet arbre, raconte Robert Kamau, un agriculteur à la tête de quatre hectares de plantation. Au moins 2 000 avocats. Si vous multipliez cela par 10 shillings, il y en avait pour 200 dollars. J’étais fou de rage. Ils ont même tué mes chiens ! Je ne dors pas bien pendant la période de récolte.”
Cette somme de 200 dollars de butin représente deux fois le salaire minimum au Kenya. Les agriculteurs comme Robert doivent désormais investir dans des systèmes de sécurité, des gardes de nuit et des clôtures électrifiées pour protéger leurs fruits. Mais peu d’entre eux peuvent se le permettre financièrement.
Un nouveau "pétrole vert"
Ces vols s’intensifient particulièrement en ce moment : ce n’est pas encore la saison des avocats, la demande internationale n’est pas satisfaite et les prix s’envolent. “Depuis le mois de décembre, la demande internationale pour les avocats explose, explique Ernest Muthomi, président de l’association des producteurs d’avocats au Kenya. Les prix deviennent délirants car l’avocat est une culture saisonnière et en ce moment, aucun pays n’a d’avocat mûr. Donc si vous parvenez à vous en procurer et à les revendre sur le marché mondial, vous êtes riche."
"Dix avocats peuvent vous rapporter 100 dollars, c'est énorme pour quelqu’un qui n’a pas d’emploi.”
Ernest Muthomi, président de l’association des producteurs d’avocats au Kenyaà franceinfo
Ces vols atteignent un niveau tel que cela entraîne des violences dans la région jusqu’à la mort parfois d’assaillants. Le gouvernement a interdit depuis peu l’exportation d’avocats non matures pour limiter les vols avant la récolte. Un système de traçabilité est également à l’étude. Pas encore de quoi freiner les cartels avides de ce nouveau “pétrole vert”.
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