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En Corée du Sud, la question de l'avortement divise la société

La Cour constitutionnelle sud-coréenne doit dire cette semaine si l'interdiction d'avorter est conforme à la Constitution, après une longue réflexion sur un thème qui mobilise les associations féministes.

Article rédigé par franceinfo, Frédéric Ojardias
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des femmes sud-coréennes dénoncent la croisade contre l'avortement menée par le gouvernement lors d'une manifestation à Séoul le 5 mars 2010.
 (JUNG YEON-JE / AFP)

À Séoul, la Cour constitutionnelle entame mardi 24 avril ses délibérations  concernant l’interdiction de l’avortement. Depuis que la natalité s’effondre, le gouvernement veut plus que jamais faire respecter cette interdiction, suscitant la colère des féministes. La Corée du Sud est l’un des derniers pays développés où l’avortement reste illégal. Sous son vernis ultra-moderne, la société reste très patriarcale et les puissantes églises évangéliques ont aussi pesé pour maintenir cette interdiction. 

En réalité, pendant des décennies, cette interdiction est restée théorique. Pour freiner la croissance trop rapide de la population dans les années 1970, les autorités toléraient l’avortement. Or, aujourd’hui, avec 1,17 enfant par femme, la Corée du Sud a l’un des taux de natalité parmi les plus bas du monde. En septembre 2016, le gouvernement a menacé de punitions renforcées - jusqu’à un an de prison - les médecins pratiquant des avortements illégaux, ce qui a provoqué la colère des associations féministes qui ont lancé le mouvement "Les Protestations noires".

Stigmatisation sociale

Ces féministes refusent d’être considérées comme des "machines à faire des bébés", confie l’un des militantes. Park A-reum, du Centre d’aide contre les violences sexuelles à Séoul, explique que les hôpitaux qui acceptent les avortements clandestins font monter les prix : "Le prix d’un avortement a beaucoup augmenté. Avorter est devenu beaucoup plus compliqué pour les femmes. Certaines sont ainsi obligées d’aller le faire à l’étranger. D’autres choisissent d’accoucher puis d’abandonner leur bébé." Les condamnations restent très rares mais l’avortement étant interdit, il est synonyme de stigmatisation sociale. Les femmes n’ont accès à aucune information, et elles n’ont aucun recours légal en cas de problème médical. 

Les estimations concernant le nombre d’avortements illégaux qui sont faits chaque année en Corée du Sud varient beaucoup. Certains parlent de 500 000 par an, ce qui serait plus élevé que le nombre de naissances et qui s’expliquerait par le faible recours aux moyens de contraception. "Les cours d’éducation sexuelle n’enseignent pas aux filles comment avoir recours à la contraception, on leur dit seulement de ne pas faire l’amour avant le mariage, estime Jay, de l’ONG féministe Womenlink. Celles qui demandent à utiliser la contraception sont vues comme débauchées."

La Corée du Sud a élu en mai 2017 un gouvernement progressiste, mais celui-ci ne semble pas prêt à légaliser l’avortement et la mobilisation des associations continue.

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