En Côte d'Ivoire, une enquête recense pour la première fois les féminicides
416 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-compagnon en 2019-2020 à Abidjan, la capitale économique ivoirienne.
C'est une enquête qui fait froid dans le dos. Pour la première fois, un rapport recensant les féminicides et les violences faites aux femmes vient d'être publié en Côte d'Ivoire.
Sur la période 2019-2020, 416 femmes ivoiriennes sont mortes sous les coups de leur conjoint ou ex-compagnon. Et ce n'est qu'à Abidjan, la capitale économique où vivent 5 millions d'habitants. A titre de comparaison, 236 féminicides ont été recensés en France sur la même période.
On apprend aussi dans ce rapport qu'il y a eu 1 290 mariages forcés, plus de 1000 viols, 828 cas d’excision et près de 700 cas de pédocriminalité. Avec un pic de violences, en période de restrictions sanitaires et de confinement l’an dernier, comme partout ailleurs dans le monde.
Une omerta et des conflits réglés entre familles
Le rapport de l'ONG Citoyennes pour la Promotion et Défense des Droits des Enfants, Femmes et Minorités (CPDEFM) note que les personnes interrogées ont eu beaucoup de difficultés à se confier. L'omerta est forte en Côte d'Ivoire. Il y a même une forme de résignation à la violence. La plupart des conflits sont réglés à l'amiable, entre les familles. Cette étude est donc là pour mettre des chiffres sur une réalité cachée.
Toute violence qui est tue et non documentée est banalisée, rendue invisible.
Sylvia Apata, fondatrice de l'ONG CPDEFMfranceinfo
"Pour lutter contre l'invisibilisation des violences faites aux femmes, il faut quantifier, chiffrer", explique Sylvia Apata, fondatrice de l'ONG CPDEFM. Elle espère qu'après la publication de ce rapport, les autorités ne pourront plus fermer les yeux.
Un manque d'accompagnement des victimes
Le pouvoir ivoirien doit prendre conscience de l'ampleur du fléau, et agir, en accompagnant d'abord les victimes. "Nous voulons voir des centres d'hébergement et de transit dans toutes les localités d'Abidjan, avec du personnel qualifié", demande Sylvia Apata. "Il faudrait inclure les psychologues, renforcer le système judiciaire. Il y a beaucoup à faire. Nous, activistes, jouons notre rôle. Nous demandons à l'État ivoirien de faire sa part."
Son ONG réclame aussi une étude étendue à l'ensemble du territoire ivoirien, la formation des forces de l’ordre accueillant les victimes dans les commissariats, mais aussi des campagnes de sensibilisation de masse sur les violences faites aux femmes, pour une prise de conscience nationale.
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