En Corée du Sud, l’assassinat d’une femme par son collègue relance le débat sur le harcèlement
De nombreuses manifestations et des hommages sont organisés depuis deux semaines et les associations féministes demandent aux autorités d’agir pour protéger les Sud-Coréennes.
En Corée du Sud, le meurtre d’une femme le 14 septembre a profondément choqué le pays et relancé le débat autour du harcèlement. Revenons sur les faits : l’homme accusé du meurtre, un trentenaire, rencontre sa victime en 2019 alors qu’ils travaillent tous deux pour le métro de Séoul. Il multiplie ses avances, lui envoie des centaines de messages, la filme illégalement, la menace. Elle finit par porter plainte en octobre 2021.
Arrêté par la police, il est relâché, sans qu’aucune ordonnance d’éloignement ne soit prononcée. La veille de la date prévue du procès, il se rend à la station de métro où elle travaille et la poignarde dans les toilettes. Quinze jours plus tard, il est finalement été condamné à neuf ans de prison pour harcèlement.
Des milliers d'hommages
Après ce crime atroce, qui fait immédiatement la une des journaux, des milliers d’hommages sont rendus à la jeune femme assassinée. En premier lieu devant la scène de crime, où des milliers de messages sont inscrits sur des post-it, et des fleurs blanches déposées au sol devant les toilettes des femmes. Kang Ka-eun est venue comme d’autres Sud-coréennes, écrire quelques mots pour exprimer son soutien et son indignation : "Récemment j’ai vu la nouvelle de ce meurtre, donc je voulais exprimer mes condoléances à la victime, c’est pour ça que je suis venue ici. J’ai été très choquée d’apprendre ce meurtre, c’est un lieu extrêmement fréquenté."
"Quand j’ai vu les titres des articles de journaux qui expliquaient que c’était un harcèlement qui avait mené au crime, je me suis dit c’est juste hallucinant."
Kang Ka-eunà franceinfo
Le crime suscite une vague d’indignation dans le pays car le suspect avait déjà été interpellé et de très nombreuses manifestations sont organisées depuis le meurtre pour demander aux autorités de protéger les femmes Sud-Coréennes. Lors de l’une d’entre elles, samedi, se trouvait Kim, la vingtaine, vêtue de noir, comme d’autres dizaines de manifestantes. "Je suis déjà allée à des manifestations féministes et à cause de cela on disait que je détestais les hommes, indique-t-elle. Sur les réseaux sociaux, j’ai été harcelée et j’ai reçu des appels très menaçants. Donc quand j’ai vu cette nouvelle du meurtre de Sindang, je me suis dit ça peut m’arriver à moi, ou à ma sœur. Il faut briser ce cycle de la violence."
La loi doit évoluer
Changer les mentalités ne suffira pas : il faut aussi changer les textes de loi. En Corée du Sud, le harcèlement est puni de trois à cinq ans de prison depuis octobre 2021. Auparavant, les personnes jugées coupables ne pouvaient écoper que d’une amende de 72 euros. La nouvelle législation reste insuffisamment protectrice des femmes selon cette étudiante en droit à l’université Sungshin de Séoul : "La loi est défaillante car le harceleur et sa victime peuvent avoir un accord juridique avant le procès. Le problème est que cela peut créer une nouvelle phase de harcèlement après la plainte. Car le harceleur va appeler sans arrêt sa victime afin de la pousser à accepter l’accord financier qui lui est proposé. Cela revient à créer un deuxième harcèlement."
Depuis la mise en place de la nouvelle loi en octobre 2021, plus de 7000 personnes ont été arrêtées pour des faits de harcèlement. Seuls 5% des suspects ont été incarcérés.
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