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La Suède critiquée par la communauté scientifique pour avoir acheté des crédits carbone au Ghana

La Suède se fixe un objectif de neutralité carbone en 2045. Elle a pris de l'avance en matière de réduction des émissions de CO2, mais c'est aussi l'un des pays d'Europe qui a le plus investi dans des projets à l'étranger, afin de compenser ses émissions. La communauté scientifique est donc très critique.
Article rédigé par franceinfo - Carlotta Morteo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Une usine en Suède (photo d'illustration). (OLIVIER MORIN / AFP)

Si la Suède a fixé un objectif de neutralité carbone à l'intérieur de ses frontières en 2045. Dans ce pays, un gouvernement de droite a été élu en automne 2022. L'une des premières mesures a été de baisser les taxes sur le diesel et de favoriser ainsi les industries polluantes. La conséquence directe a été une augmentation inédite des gaz à effets de serre émis par la Suède.

Quand ces nouveaux projets de compensation ont été annoncés, les scientifiques ont dénoncé une forme de cynisme, estimant que la Suède transfère ses responsabilités climatiques sur des pays pauvres. C'est le cas de Kristine Christensson, chercheuse à l’Université de Copenhague et spécialiste des questions liés au marché du carbone. “Une des raisons qui poussent les pays à investir dans ces pays, c’est parce que c’est souvent moins cher de financer un projet dans le sud que de le faire chez nous. Replanter une forêt par exemple, on peut se poser la question : 'Est-ce que c’est juste que ces pays “nettoient” nos émissions carbones contre une petite rétribution, alors que nous avons gagné beaucoup d’argent grâce aux industries polluantes qui ont généré tout ce CO2 ?'"

Le projet au Ghana est l'un des plus aboutis

La scientifique poursuit : "Avant, avec le Protocole de Kyoto, seuls les pays développés avaient des objectifs de réduction d’émissions. Mais aujourd’hui, tous ont ce genre d'obligations sauf que, quand la Suède achète des crédits carbone au Ghana, par exemple, en investissant dans des projets là-bas, ça ne compte pas dans le bilan du Ghana pour ses propres objectifs." Les pays pauvres vont donc devoir, à terme, compenser leurs propres émissions en achetant à l’étranger des crédits carbone qui seront finalement plus chers que ceux qu’ils ont vendu chez eux. L'achat de crédits carbone à l'étranger fait partie des outils qui sont encouragés notamment par l’article 6 de l’Accord de Paris sur le Climat.

L’Agence de l’énergie suédoise a affirmé que grâce à ce projet d'énergie renouvelable envisagé au Ghana, le plus abouti pour l’instant, la Suède compensera un certain nombre de ces émissions, mais seulement quelques années. Ensuite, il est prévu que le Ghana récupère les crédits carbone à son compte. Les négociations sont secrètes, mais ce genre de deal se fait au cas par cas, et la Suède défend dans tous les cas le fait que ces investissements dans les énergies vertes servent in fine à accélérer la transition des pays où ils sont implantés. Un argument qui n’a pas fait ses preuves selon les scientifiques, puisqu’il n’est pas dit que cette énergie remplace les énergies fossiles.

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