Histoire de folles rumeurs. Les bouillons KUB sont au service de l'armée allemande
Une rumeur qui se diffuse dans un contexte de haine et de peur.
Eté 1914. C’est la guerre. Après des années de bourrage de crâne, la haine et la peur de l’Allemagne irriguent la société française. Des sentiments propices à la propagation de rumeurs. Et en ce début du mois d’août 1914, l’antigermanisme viscéral a besoin d’ennemis, identifiés et à abattre. L’un d’eux est une entreprise bien connue en France, dont le produit phare est dans des millions de cuisines françaises. Cette entreprise, c’est Maggi, et ce produit, c’est le bouillon KUB. Rien, absolument rien, ne prédisposait Maggi à être pris dans le tourbillon de la guerre. L’entreprise fournissait l’armée française et ne faisait pas de politique.
Mais le bouillon KUB porte la lettre K. Le signe d’une germanité coupable. Le K du Kaiser ou le pain des soldats allemands KK pour Kriegs Knäckebrot. Maggi qui a senti le mauvais coup venir, avait demandé au tribunal de commerce de franciser le nom, en vain. Il n’est pas bon avoir un nom à consonance germanique dans la France du mois d’août 1914. Les brasseries Zeyer, Zimmer, ou Wepler, des noms allemands bien que fondées par des Alsaciens, sont saccagées.
Trois rumeurs frappent Maggi
Julius Maggi aurait tenté de s’enfuir vers l’Allemagne au début des conflits, embarquant avec lui 40 millions de francs dissimulés dans des bouteilles de lait. La rumeur veut qu’il ait été arrêté. Une rumeur qui ne tient pas debout, puisque l’entrepreneur italo-suisse est décédé le 19 octobre 1912, soit deux ans avant les faits qu’on lui reprochait.
Une autre rumeur voulait que les bouteilles de lait de la marque aient été empoisonnées. Et surtout, nombreux sont les Français persuadés que Maggi n’est qu’une entreprise servant à couvrir des espions allemands. Les affiches publicitaires sont des messages codés destinés à guider les Allemands vers les ouvrages et les ponts français stratégiques. La rumeur remonte au plus haut niveau puisqu’un télégramme du ministère de l’Intérieur français prévient en août 1914 : "Extrême urgence. Prière faire détruire complètement affiches du bouillon KUB placées le long des voies ferrées et particulièrement aux abords des ouvrages d’art importants, viaducs, bifurcations…"
Les Français boycottent le bouillon KUB. Ce qui fait le bonheur de l’entreprise Duval, qui demande aux Français d’être de bons patriotes et d’acheter ses propres cubes. Dans les tranchées toutefois, les poilus continuent pendant la guerre d’utiliser les bouillons KUB de chez Maggi.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.