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Histoires d'Info. Quand Kennedy se faisait dévorer par Khrouchtchev

Le président de la République, Emmanuel Macron, reçoit Vladimir Poutine au château de Versailles lundi. Cela rappelle les débuts sur la scène internationale de John Kennedy.

Article rédigé par franceinfo, Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le président américain rencontre Nikita Khrouchtchev,  leader de l'URSS à Vienne (Autriche), le 3 juin 1961. (INTERFOTO)

Emmanuel Macron reçoit Vladimir Poutine, son homologue russe, lundi 29 mai au château de Versailles. Un vrai test  pour le président français face à un leader puissant. Cela n'est pas sans rappeler les débuts sur la scène internationale de John Kennedy.

Un accueil enthousiaste en France 

Nous sommes le 1er juin 1961 et les Actualités Françaises commentent : "Versailles était le dernier décor et le dernier acte de la visite du président des Etats-Unis à Paris. Et à travers cette admirable toile de fond, on a pu voir le général de Gaulle et madame Kennedy ouvrir le cortège qui allait, circonstance dont la rareté fait aussi le prix, dîner dans la galerie des Glaces." Ce jour-là, le général de Gaulle reçoit John Kennedy et sa femme Jackie au château de Versailles pour conclure la visite officielle de trois jours du président américain en France. Il invente une tradition qui s'éteindra peu à peu mais qui pourrait renaître avec Emmanuel Macron, un président en quête de symboles de sacralité.

La Kennedymadia semble s'être emparée de la France. Jackie a en plus l'atout d'avoir des origines françaises et de parler assez correctement le Français. Cela fera dire à John au début d'un de ses discours lors de ce voyage : "Je suis l'homme qui accompagne Jacqueline Kennedy à Paris et j'en suis ravi." Eclats de rire de l'assistance assurés, Kennedy sait y faire. Ce 1er juin 1961 au soir, le couple présidentiel dîne au château de Versailles dans une galerie des Glaces éclairée aux bougies. "Je me crois transportée au ciel, je n'ai jamais rien vu de pareil" dira Jackie.

Kennedy décontenancé par Khrouchtchev

Mais les choses changent très vite. Dans la foulée de sa visite en France, Kennedy décolle pour Vienne où il doit y rencontrer Nikita Khrouchtchev, le puissant leader de l'URSS. Et il y a du Macron - Poutine là dedans : un jeune dirigeant inexpérimenté doit faire ses preuves face à un adversaire géopolitique majeur qui ne fera pas de cadeaux. Khrouchtchev n'a cessé de dire qu'il avait hâte de rencontrer "ce jeune président qui a l'âge de mon fils." Kennedy, lui, veut se donner la stature d'un vrai leader dans ce contexte tendu de la Guerre froide. Il a préparé cette entrevue au maximum, en témoignent les archives américaines déclassifiées.

Dans la capitale autrichienne, tout ne se passe pas très bien. Khrouchtchev humilie le président américain en lui faisant une vraie leçon d'histoire et de géopolitique jusque devant les médias. N'oublions pas non plus que nous ne sommes que quelques semaines après le vol de Youri Gagarine, premier homme dans l'espace et qu'en réponse, Kennedy a affirmé sa volonté d'envoyer un homme sur la Lune avant la fin de la décennie. À Vienne, Khrouchtchev ne s'est donc pas privé pour rappeler à Kennedy les nombreux succès soviétiques sur les Etats-Unis dans la course à l'espace : il lui a offert l'un des chiots de Strelka, le premier animal ayant réussi à revenir vivant d'un voyage dans l'espace l'année précédente.

Kennedy rentre penaud à Washington comme en témoigne cette archive des actualités de l'époque : "Un élément peut-être essentiel a frappé ceux qui, sur place ou par la télévision, ont assisté à l'arrivée du président. En mai 1960, lorsque le président Eisenhower est rentré du sommet torpillé de Paris, il a été reçu à Washington avec fanfare et cortège. Rien de tout cela pour le retour de monsieur Kennedy aujourd'hui. Le président lui-même avait l'air soucieux et en tout cas pressé de regagner en hélicoptère la Maison Blanche, son cabinet de travail et ses téléphones." De retour à la Maison Blanche, il dira même à son frère Bobby au sujet de Khrouchtchev : "Il est pire que papa." Cela en dit long sur le rapport qu'a réussi à imposer l'homme de Moscou. Par la suite, Kennedy n'aura de cesse de vouloir prendre sa revanche sur Khrouchtchev et il en trouvera l'occasion en octobre 1962 lors de la crise de Cuba lors de laquelle le monde a failli plonger dans une guerre atomique.

On souhaite une rencontre plus apaisée entre Macron et Poutine.

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