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Histoires d'info. Loi "anti-casseurs" : un air de 1970 souffle sur la France

Cette loi "anti-casseurs", que le gouvernement veut instaurer, n'est pas la première à porter ce nom. Il y a près de 50 ans, une première loi de ce type avait été votée. Le débat d'alors ressemble beaucoup à celui d'aujourd'hui.

Article rédigé par Thomas Snégaroff
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Jacques Chaban-Delmas,candidat de l'UDR à l'élection présidentielle de 1974, en meeting à Paris, le 2 mai 1974.  (MARC CHARUEL / MARC CHARUEL)

Cette première loi anticasseurs date de 1970, au lendemain des graves désordres de mai 1968. L’État considère avoir suffisamment donné, lors des accords de Grenelle notamment, et tente de mettre un terme aux manifestations très violentes organisées particulièrement par ceux qu’on appelle encore alors les "gauchistes".

Une loi en défense de la République

Le gouvernement Chaban-Delmas propose une loi, qui porte également le nom de "loi anti-casseurs" et qui est débattue au Parlement. C’est une loi qui rappelle dans ses grands principes la loi actuelle, puisqu’il s’agit de pénaliser la participation aux manifestations violentes. On y trouve notamment l’idée du casseur/payeur. Une loi qui renforce également le contrôle des manifestants et, en cela elle va plus loin que l’actuelle, pénalise la simple présence lors d’une manifestation qui bascule dans la violence.

Mais s’il y a un parallèle entre la loi de 1970 et celle de 2019, c’est la justification par le pouvoir d’une telle loi. "Il s'agit bien de la défense des libertés, collectives et individuelles, de la défense des personnes et des biens contre les tenants de la violence et les ennemis de la République", explique ainsi le Premier ministre Jacques Chaban-Delmas à l’Assemblée nationale. Ce pourrait être Édouard Philippe ou Christophe Castaner.

La gauche dénonce une loi "liberticide"

Là aussi, le parallèle entre 1970 et 2019 est frappant : toute la gauche est vent debout contre le texte et particulièrement François Mitterrand, qui y voit une loi liberticide et le signe de l’échec du pouvoir en place. "En fait cette loi interdit le droit de manifester, le droit de se réunir", déclare ainsi en avril 1970 le futur président. ;

Cette loi ne va d'ailleurs pas résister à l’arrivée de la gauche au pouvoir. Dès 1981 – c’était une promesse de campagne de François Mitterrand – cette loi est abrogée. Elle est remplacée quelques mois plus tard, en 1982, par la loi "Sécurité et liberté". Le mot liberté est ici important, on sent la volonté d'intégrer cette dimension qui était absente, selon la gauche, de la loi anti-casseurs de 1970.

La gauche accusée de laxisme

Immédiatement, la droite y voit le signe du "laxisme" traditionnel de la gauche. En témoigne ici les propos d’Alain Peyrefitte qui considère que "le fond du problème, c'est que l'on démantèle les défenses que la société avait dressé pour se protéger. Cette loi nouvelle va protéger les malfaiteurs contre les honnêtes gens".

Défense de la République, critique de la gauche et attaque en laxisme de cette même gauche, finalement l’ancien monde et le nouveau monde, ce n’est pas si différent que cela.

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